Crise sanitaire : quelles mesures juridiques pour prévenir l’effondrement de la recette de CVAE de 2021 pour les collectivités locales ? par Michel Klopfer

Budget / Finances / Fiscalité

Commentaire

Crise sanitaire : quelles mesures juridiques pour prévenir l’effondrement de la recette de CVAE de 2021 pour les collectivités locales ? par Michel Klopfer 

Le chevauchement de deux exercices de collecte pour le calcul de la CVAE que l’État verse aux collectivités, risque d’aboutir en 2021 à une baisse de 20 à 40 % sur les 17 Milliards d’euros que représente cette ressource pour les régions, intercommunalités et départements. Pour prévenir de tels effets d’anticipation de la part des entreprises, et limiter la baisse à 6 %, l’État devrait décaler au 15 décembre la date de paiement de l’acompte et en contrepartie réglementer le mode de calcul de cet acompte sur la base des évolutions de chiffre d’affaires constatées sur les 11 premiers mois de l’année.

Très nombreuses sont les recettes locales, directement liées à l’activité économique du pays, et qui vont plus ou moins fortement fléchir en 2020, suivant que la crise sanitaire dure plusieurs mois ou seulement quelques semaines.

Cela concerne entre autres les droits de mutation des départements et des communes, la taxe d’aménagement, la taxe de séjour, la part non garantie de la taxe sur les carburants et produits énergétiques (TICPE), les droits de place et autres recettes d’exploitation et de tarification des collectivités locales et bien entendu la fraction de TVA que perçoivent les régions depuis 2018 en lieu et place de leur ancienne DGF

Sur ces différentes ressources, il faut distinguer deux facteurs distincts :

• La période d’interruption proprement dite d’une très grande partie des échanges commerciaux : en période de confinement, il n’y a pas de transactions immobilières, d’activité touristique, de consommation de carburants, etc.

• À moyen terme, l’impact de l’appauvrissement général des patrimoines occasionné par la montée exponentielle de la dette publique et privée et la chute des actifs boursiers. L’entreprise qui aura été sauvée in extremis par l’obtention d’un prêt bancaire garanti par l’État, à hauteur du quart de son chiffre d’affaires de 2019, n’en devra pas moins le rembourser, lorsque ses activités pourront reprendre, et cela plombera pour quelque temps ses capacités d’investissement ainsi que celles de ses dirigeants et cadres dont les dividendes auront été gelés et la valeur de leur portefeuille boursier amputé. On peut donc en attendre un recul des prix de l’immobilier par rapports aux sommets atteints à l’hiver 2019-2020.

Au-delà de ces facteurs immédiats, se profile également pour 2021 un choc sur un autre impôt de flux que les collectivités lèvent depuis 2011, à savoir la Cotisation à la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et qui représente autour de 17 Milliards d’euros en 2019 répartis entre les régions (50%), le bloc communal (26,5% très majoritairement dans les comptes intercommunaux) et les départements (23,5%).

Compte tenu de la définition même de ce qu’est le Produit Intérieur Brut (PIB), à savoir la somme des valeurs ajoutées de l’économie, il serait logique de penser que la CVAE est directement corrélée à cet agrégat macroéconomique. Comme en ce début avril, il est évoqué une baisse du PIB de l’ordre de 6 % en 2020 par rapport à 2019, on pourrait donc, dans une première approche, tabler sur le même fléchissement de la CVAE en 2021.

Mais les choses ne sont pas aussi simples car la CVAE encaissée par les collectivités, sur une année donnée n, ne correspond pas aux montants versés par les entreprises, au titre de la CVAE de l’année n-1 mais à ceux encaissés par l’’Etat, au cours de cette même année n-1, lesquels recouvrent deux morceaux de campagnes de collecte : le solde de l’année n-2 et les acomptes de l’année n-1.  En effet, au cours de cette année n-1, les entreprises acquittent successivement le 15 mai le solde de l’année n-2, puis le 15 juin et le 15 septembre deux acomptes représentant chacun 50 % de la CVAE estimée de l’année n-1. En théorie chacun des acomptes est établi au regard de la valeur ajoutée de n-2 mais l’entreprise à la faculté, sous sa responsabilité, de réduire le montant de ses acomptes, si elle considère que sa valeur ajoutée estimée de n-1 sera en retrait sur celle de n-2.

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AUTEUR(S) : Hélène Pauliat, Didier Jean-Pierre, Florian Linditch, Philippe Billet et Michaël Karpenschif.