[3 QUESTIONS À ] Christiane Féral-Schuhl « Une profession d’avocat indépendante, forte et unie est un prérequis indispensable à la primauté du droit » – 7 septembre 2020

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE DU DROIT – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 37 – 7 SEPTEMBRE 2020

3 questions à Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux (CNB), avocat associé aux Barreaux de Paris et du Québec, ancien Bâtonnier de Paris

Les avocats sont des acteurs incontournables du Rule of law. Christiane Feral Schuhl nous expose le point de vue des avocats en tant que présidente du CNB et nous détaille les missions et actions du CNB mises en place. V. également dans ce numéro, Entretien avec Chantal Arens, « Renforcer le dialogue des juges aux niveaux national et européen, garantir l’impartialité de la justice par des règles de procédure civile et pénale stables et par l’indépendance juridictionnelle, sont autant de leviers pour faire respecter la primauté du droit » : JCP G 2020, act. 976

Comment interprétez-vous les enjeux économiques et politiques qui se profilent derrière le Rule of Law ?

Le Rule of law, ou primauté du droit, est un mécanisme de contrôle indépendant de l’action privée et publique, transposable dans tous les systèmes juridiques, et permettant de se prémunir efficacement contre l’arbitraire. Cette notion est plus large et plus flexible que la notion de démocratie, qui renvoie à un mode d’organisation de l’action publique et de la gouvernance, et plus concrète que les notions traditionnelles de droits fondamentaux ou de libertés publiques. Les enjeux économiques et politiques de l’effectivité d’un tel mécanisme sont innombrables. Du point de vue politique d’abord, le Rule of Law, ou primauté du droit, doit permettre le respect des droits et libertés les plus essentiels, en garantissant l’égalité devant la loi, la prévisibilité de celle-ci et l’indépendance du pouvoir judiciaire qui contrôle l’exécution des normes. Il est également une garantie en faveur d’une répartition équilibrée des pouvoirs, à l’heure où les néologismes de « démocratures » ou de « démocraties illibérales » font leur apparition dans le lexique des sciences politiques. De ce point de vue, l’État de droit représente une méthode supplémentaire d’analyse d’exercice du pouvoir. Du point de vue économique ensuite, la primauté du droit est vectrice de sécurisation des relations juridiques et des investissements et est un moyen de lutte efficace contre l’arbitraire. Elle est également un outil essentiel de lutte contre la corruption et l’accaparement des biens et des pouvoirs d’une minorité au détriment de la majorité. Ces deux dimensions en font une condition importante du développement économique.

Le Rule of law est la garantie de la dignité de chaque être humain en permettant un contrôle effectif des normes au regards des principes essentiels portés au sommet de la pyramide juridique. À cet égard, le Rule of law, dans son acception moderne et dans un contexte mondialisé, accélère l’essor de nouveaux corpus normatifs liés au respect, par les entreprises, des droits fondamentaux des salariés de leurs filiales, partenaires et sous-traitants.

Levier majeur pour le développement du droit dans le monde, quels bénéfices les sociétés civiles et opérateurs économiques peuvent-ils tirer du Rule of law et quels en sont les enjeux futurs ? Cette notion devient effectivement incontournable et remet le droit et ses acteurs au centre du jeu politique et du développement économique. Plus que le développement du droit, le Rule of law devient un prisme d’analyse souple par lesquelles comportements privés comme publics sont jaugés et encadrés. Les sociétés civiles doivent se réjouir de cette approche renouvelée.

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