[3 questions] Protection sociale complémentaire (PSC) : gare à la formalisation des régimes d’entreprises !

EXTRAIT DE LA REVUE SEMAINE JURIDIQUE – ENTREPRISE ET AFFAIRES – N° 14 – 4 AVRIL 2019

PROTECTION SOCIALE

Protection sociale complémentaire (PSC) : gare à la formalisation des régimes d’entreprises !

Dimitri Coudreau avocat, AVANTY Avocats
Alexandre de Louvigny avocat, AVANTY Avocats

Pour la première fois depuis la loi « Fillon » du 21 août 2003 (L. n° 2003-775, 21 août 2003, portant réforme des retraites : JO 22 août 2003, texte n° 1), la Cour de cassation se prononce sur l’exigence d’une formalisation d’un régime de protection sociale dans un arrêt « Picard Serrures » du 14 mars 2019 (Cass. 2e civ., 14 mars 2019, n° 18-12.380, F-P+B). Cette jurisprudence sévère appelle autant à la vigilance des entreprises et de leurs conseils qu’à une prise en compte par les hauts magistrats des contraintes particulières portant sur les employeurs.

1- Quelle est l’incidence de l’absence de formalisation d’un régime d’entreprise ?

La formalisation d’un régime d’entreprise (santé, prévoyance ou retraite) par un acte collectif tel que listé par l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale (CSS) (accord collectif ou référendaire, décision unilatérale de l’employeur constatée par un écrit remis à chaque salarié intéressé) est une des conditions d’exclusion du financement patronal de l’assiette des cotisations de sécurité sociale exigées par l’article L. 242-1 du CSS. Fut une époque, ce texte admettait l’exonération « lorsque [les] garanties entrent dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du [CSS] ». Désormais, il exige que les « contributions des employeurs destinées au financement des prestations de protection sociale complémentaire entrent dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du présent code ». Dans les deux cas, ce sont des formulations générales qui autorisent une marge d’appréciation qu’hélas, la Haute juridiction ne semble pas prendre en compte.

2- Que doit-on retenir de l’arrêt « Picard Serrures » ?

La société avait formalisé un régime « frais de santé » par une décision unilatérale qui prévoyait la répartition du financement. En 2010, l’entreprise change de contrat d’assurance, et modifie cette répartition, sans remettre à chaque salarié un nouvel écrit constatant l’évolution à la baisse de la nouvelle cotisation. La Haute juridiction confirme l’arrêt ayant approuvé le redressement au motif que le nouveau niveau de cotisation n’avait pas été valablement formalisé dans l’acte collectif. Cette solution confirme la particulière sévérité de la deuxième chambre civile à l’encontre des cotisants. Au cas d’espèce, la modification avait abouti à réduire la cotisation globale supportée pour partie par les salariés. Ce n’était donc pas un cas de défaut pur et simple d’acte collectif ou encore de formalisme insuffisant en cas d’augmentation de la cotisation. La raison d’être du recours à un tel acte se comprend par le souci que les salariés puissent valablement accepter le précompte, soit collectivement par la signature de leurs représentants ou par le vote majoritaire, soit individuellement en cas d’instauration unilatérale.

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