La Semaine Juridique Edition Générale n°24
LA SEMAINE DU DROIT L’APERÇU RAPIDE
COUR DE CASSATION
Sublimer l’essence de la Cour de cassation ?
À propos du rapport de la Commission de réflexion sur la réforme de la Cour de cassation
POINTS-CLÉS ➜ La Commission de réflexion sur la réforme de la Cour de cassation vient de rendre un rapport extrêmement important contenant 70 propositions ➜ Si le souhait de résoudre la crise frappant le parquet général y est présent, l’essentiel de ces propositions marquent surtout la volonté de renforcer son rôle normatif ➜ À cette fin sont notamment proposées la création de différents circuits de traitement et une motivation enrichie ➜ La problématique du contrôle de proportionnalité bien qu’essentielle n’occupe qu’une place de second ordre
Julien Théron, professeur de droit privé, université Toulouse 1-Capitole
Fascination. – Le présent rapport ne peut que susciter la fascination. Les raisons en sont multiples. Institution centrale et fondamentale dans la réalisation du droit privé, la Cour de cassation entend être réformée ou du moins s’interroge quant à l’opportunité de l’être et aux pistes envisageables à cet effet. Le travail est d’une ampleur extraordinaire (285 pages sans les annexes). La transparence du processus doit être soulignée. La remise de ce rapport alors que la réflexion n’est pas achevée, tout comme l’organisation d’un colloque à mi parcours (V. Regards d’universitaires sur la Cour de cassation : Supplément au JCP G n° 1-2, 11 janv. 2016 ) témoignent du souhait de la Cour de ne pas s’ « auto-réformer » en catimini. La Cour de cassation engage cette réflexion avec les différents acteurs qui concourent à son fonctionnement – magistrats du siège et du parquet, avocats aux Conseils, greffe et service informatique – mais aussi avec l’université. À ce titre, trois professeurs ont été particulièrement associés à ce groupe de réflexion (Loïc Cadiet, Cécile Chainais et Pascale Deumier). La méthode comparatiste rend également la lecture de ce rapport passionnante. Les expériences d’autres cours suprêmes sont analysées (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Suisse, Espagne, Italie), laissant de côté toute idée selon laquelle la Cour de cassation aurait une histoire et une spécificité bien trop particulière pour emprunter des procédures nées ailleurs. Enfin, si à l’évidence l’intérêt de ce rapport réside dans son contenu et les propositions qui y sont faites, il gît également dans l’analyse que la Cour de cassation fait de sa propre activité. Toute évolution nécessite avant tout une introspection, et qui n’a jamais rêvé de pénétrer l’esprit du Démiurge, pour en comprendre les aspirations mais aussi les angoisses ? La lecture de ce rapport en est l’occasion. D’emblée il est manifeste que c’est en raison d’une crise de souveraineté et d’autorité que la réflexion a été lancée. Cette institution a le sentiment de peiner à s’imposer compte tenu de la mondialisation du système juridique et notamment de l’importance prise par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Dans le même sens, sur un plan interne cette fois, elle craint que son autorité en terme normatif ne soit dégradée. En quête de souveraineté. – Ce rapport rédigé par la Commission de réflexion sur la réforme de la Cour de cassation dirigée par le président de chambre Jean-Paul Jean a été sollicité par le Premier président Bertrand Louvel en septembre 2014. L’objectif assigné à ce groupe était simple : inscrire la Cour de cassation dans son temps. En réalité c’est avant tout de reconquête de souveraineté dont il est question (V. la lettre de mission de B. Louvel). À cette fi n, l’idée originaire était simple (V. pour un aperçu critique, F. Zenati-Castaing, La juridictionnalisation de la Cour de cassation : RTD civ. 2016, p. 511 ). Le principe de subsidiarité implique que la Cour EDH n’exerce de contrôle de conventionnalité qu’à défaut de contrôle du même type par le juge national ( B. Louvel, Réflexions à la Cour de cassation : D. 2015, p. 1326. – Entretien avec B. Louvel, « Pour exercer pleinement son office de Cour suprême, la Cour de cassation doit adapter ses modes de contrôle » : JCP G 2015, act. 1122 ). Aussi, il suffi t que la Cour de cassation remplisse cet offi ce pour éviter que ses décisions ne soient soumises au Léviathan européen. À cette fi n il importait d’intégrer la technique du contrôle de (…)
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LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N°24 – 12 JUIN 2017
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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck