[LES ACTEURS] La vie rêvée des avocats

EXTRAIT DE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 24 – 11 JUIN 2018 – © LEXISNEXIS SA

La vie rêvée des avocats

Florence Creux-Thomas

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portrait

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Avec sa trilogie « L’avocation », « L’avocature » et « L’avocatesse » (éd. Enrick B., 2018), Aurore Boyard, avocat au barreau de Toulon, révèle l’envers du décor du monde judiciaire. Sortie du dernier opus le 11 juin.

D’énergie et d’enthousiasme, Aurore Boyard ne manque pas. D’audace non plus. En dévoilant « la vraie vie des avocats », elle dépeint le monde judiciaire vu de l’intérieur. Le ton est cash, piquant, sans fioritures. Façon roman-feuilleton, on suit les premiers pas de Léa, héroïne à « l’avocation », dont on accompagne le parcours initiatique vers l’avocature. Rêvée la vie des avocats ? C’est ce que croyait Léa avant d’intégrer son premier cabinet où, de dossiers volumineux en permanences pénales, de nuits blanches en audiences, elle découvre un univers judiciaire impitoyable et une galerie de personnages, associés, magistrats, greffiers, forces de l’ordre, dont elle doit apprendre les codes.

Largement inspirée du vécu d’Aurore Boyard, la trilogie dévoile avec humour les facettes du métier et lève des tabous. « Je parle de ce qui va dans notre profession, mais aussi de ce qui ne va pas. Les confrères sont souvent en surmenage, voire en burn-out mais ils n’osent pas se l’avouer ». L’avocate raconte le choc des débuts. « Le jeune avocat est seul, il n’est pas préparé à ce qui l’attend. J’avais beaucoup fantasmé le barreau, je croyais que tout le monde appliquait notre serment. Ça a été très violent les 2 premières années ».

À l’heure de la libération de la parole des femmes, l’intrigue révèle des problématiques sensibles au sein d’une profession que l’on aurait pu croire épargnée. Les difficultés d’insertion des femmes désormais majoritaires dans un milieu resté viril, les inégalités et les discriminations récemment mises en lumière par une enquête du Défenseur des droits. Lauréate de la Conférence du stage, Aurore Boyard avait choisi comme thème « Robe sur robe ne vaut ». Une plaidoirie reprise par son héroïne Léa. « Le barreau est finalement à l’image de la société, pourquoi serait-il différent ? Dans la lutte pour l’égalité hommes-femmes,les femmes aussi doivent se remettre en question ». Elle propose de tendre la main aux jeunes consoeurs au sein de « cabinets refuge », en mettant à disposition un bureau vacant pour des victimes de harcèlement. « En Province, je n’ai pas le sentiment que les choses bougent. Il faut aller plus vite et plus loin, réunir le barreau ».

Dans ce monde judiciaire à la fois épineux et trépidant, il faut avoir le cuir dur et la vocation. Aurore Boyard, un père garagiste et une mère secrétaire, l’a eu très jeune, et elle ne s’est jamais démentie. Optimiste, pugnace, et tournée vers les autres, cette spécialiste en droit de la famille, des personnes et du patrimoine, depuis 20 ans veut transmettre sa passion : « ce qui est plus fort que le reste, c’est l’humain. On vient me voir dans des moments heureux, ou pour régler sa succession, je reçois des enfants qui me remercient “grâce à toi on m’a écouté”. Le civil aussi est violent ». L’avocat est comme un médecin, un chirurgien du droit.

Mère de 2 garçons, la volubile Aurore Boyard décroche rarement. « Ma récréation ce sont mes livres, les cours à la faculté, Sud Radio », où elle est chroniqueuse le samedi dans l’émission « Regard de femmes », et le Salon Livres Justice et droit qu’elle a co-fondé et dont la 4e édition (2019), parrainée par Bernard Cazeneuve et Isabelle Rome, aura pour thème « Égalité hommes-femmes, droit et sport ». L’événement rassemble professionnels du droit et grand public venu découvrir le fonctionnement de la justice à travers des conférences.

Par ses ouvrages, où elle donne à voir les arcanes du monde judiciaire et ses personnages, Aurore Boyard poursuit cette démarche de vulgarisation du droit. « Mes lecteurs sont des justiciables comme des professionnels qui se reconnaissent dans mes écrits. Au tribunal, on m’appelle parfois Léa, ça détend l’atmosphère ».

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck

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