EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 42 – 14 OCTOBRE 2019
LA SEMAINE DU DROIT LES ACTEURS
Laure Lavorel, présidente du Cercle Montesquieu
Directrice juridique international de Broadcom, Laure Lavorel a été nommée présidente du Cercle Montesquieu le 17 juin pour 3 ans. La nouvelle ambassadrice des directeurs juridiques dresse leur portrait–robot (V. dans ce numéro, JCP G 2019, prat. 1071, 3 questions).

À la fois rigoureux et créatif. « Le juriste n’est pas un empêcheur de tourner en rond, au contraire il accompagne intelligemment le chef d’entreprise, plus ce dernier prend des risques, plus il a besoin de lui. Le juriste est celui qui vous fait sauter en parapente et retomber sur vos pieds ! ».
La nouvelle présidente du Cercle Montesquieu vit ainsi sa profession, avec passion et enthousiasme, et déplore qu’en France, le juriste soit moins valorisé qu’ailleurs, comme aux États-Unis où il est un personnage- clé de la stratégie. « Les entreprises ont fait des progrès, même si cela dépend des secteurs et des sensibilités des CEO ». Work in progress.
Laure Lavorel en appelle à un changement de culture. Pure coïncidence ? Sa nomination est concomitante du rapport Gauvain pour « Rétablir la souveraineté de la France » et protéger les entreprises « des lois à portée extraterritoriale », qui a remis le statut d’avocat en entreprise au coeur des débats. Avant de rejoindre le Cercle Montesquieu, Laure Lavorel avait déjà créé « Barreau en entreprise » : « Quand on travaille avec des américains, le vrai sujet c’est la confidentialité des avis, le legal privilege , que seul ils respectent puisqu’ils l’appliquent ». Pour la présidente, il s‘agit là « d’un enjeu d’intérêt général et de compétitivité de la France, seul pays avec l’Italie à ne pas avoir le legal privilege. C’est un frein à l’implantation de grandes directions juridiques internationales, notamment dans le contexte du Brexit ».
Ancienne avocate d’affaires spécialisée dans les nouvelles technologies, Laure Lavorel, qui a exercé à New York et travaille avec la Silicone Valley, a fait carrière au sein de grands groupes américains comme Oracle,
l’un des leaders mondiaux de logiciels, qui l’avait débauchée du cabinet Archibald Andersen. « J’avais envie d’être au coeur du réacteur et j’ai aimé tout de suite le métier de juriste d’entreprise ». Chez CA Technologies, repris par Broadcom Corporation, une entreprise américaine de l’industrie de l’électronique, elle prend la direction juridique de la région Europe Middle East Africa, puis récemment de l’Asie et du Pacifique. « J’ai grandi dans cette entreprise. À l’époque, il y avait peu de règles écrites, les praticiens inventaient le droit. La réglementation s’est beaucoup inspirée de la soft law ».
Laure Lavorel rêvait d’être comédienne. Ses parents l’inscrivent en droit, elle sera avocate. Dans la discipline juridique, elle trouve la rigueur mais aussi la créativité de la danse classique que cette hyperactive pratique toujours 2 fois par semaine et lui procure cette belle énergie. « Il y a les mêmes lois de la gravité, si le juriste ne les respecte pas, il tombe et s’il n’est pas créatif, il n’est pas bon ».
Aujourd’hui, en plus, le juriste doit être digital. « Les directions juridiques sont dans une situation de rupture avec les nouvelles technologies ». En créant « La Factory » au Cercle Montesquieu, Laure Lavorel a souhaité encourager la digitalisation en mettant à la disposition des membres une plateforme virtuelle d’échanges. « L’intelligence artificielle est le sujet du moment. L’objectif est de passer moins de temps sur les tâches à faible valeur ajoutée, en aucun cas de faire baisser les effectifs ». La présidente ne croit pas dans le juriste-robot. « Les grandes décisions sont toujours disruptives, or le logiciel ne peut pas l’être. L’aide à la décision est davantage une matière à penser ».
Passée par les différentes professions du droit, – avocat, juriste d’entreprise mais aussi juge consulaire au Tribunal de commerce de Paris pendant 5 ans – cette fervente partisane de la grande profession du droit, en permanence entre 3 continents, invite les juristes à se dépasser.

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck