EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 15 – 13 AVRIL 2020
Comment la commande publique s’adapte-t-elle à la crise sanitaire ?
Des assouplissements encadrés
Dès le début de la crise sanitaire, les marchés publics ont fait l’objet d’annonces très rapides du Gouvernement. Bruno Le Maire a ainsi affirmé dès vendredi 28 février 2020 que « le covid-19 sera considéré comme un cas de force majeure pour les entreprises en particulier au regard des marchés publics de l’État ». D’autres communications de Bercy ont ensuite indiqué qu’il en serait de même pour les marchés des collectivités territoriales. Ces annonces ont rapidement été nuancées par la direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy puis complétées par l’Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au Code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19.
Fleur Jourdan, avocat au barreau de Paris, Cabinet AyacheSalama

Quels contrats s’appliquent les dispositions spécifiques de l’Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 ?
Les dispositions de l’Ordonnance s’appliquent à tous les contrats administratifs, qu’ils soient ou non soumis au Code de la commande publique, qu’ils soient en cours ou conclus durant la période courant du 12 mars 2020 jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, augmentée de deux mois, soit, à ce stade, jusqu’au 24 juillet 2020. Au-delà de ce systématisme apparent, l’Ordonnance introduit une limite forte puisqu’elle précise que ces dispositions exceptionnelles ne trouveront à s’appliquer que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de covid-19 et aux mesures, notamment de confinement, prises par le Gouvernement. Cela signifie que toutes les dérogations devront être appréciées au cas par cas sous le contrôle du juge.
Quel est l’impact de la crise sanitaire sur les contrats en cours de consultation ?
L’Ordonnance prévoit que les acheteurs ont l’obligation de prolonger les procédures en cours. Attention toutefois, ces dispositions ne valent pas, d’une part, ainsi que cela a déjà été indiqué, si la prolongation n’est pas nécessaire pour faire face aux conséquences de l’épidémie, et, d’autre part lorsque les prestations ne peuvent souffrir d’aucun retard. Le nombre de consultations concerné risque donc d’être limité. La durée de la prolongation sera appréciée par l’acheteur en prenant en compte la complexité des prestations demandées, l’éventuelle nécessité d’une visite des lieux et l’importance des pièces exigées. Il doit alors offrir une durée suffisante pour permettre aux entreprises de présenter leur offre dans des conditions satisfaisantes. En outre, l’Ordonnance permet de modifier certaines autres règles non substantielles de la consultation comme la suppression ou le report de l’obligation de visite sur place, l’introduction de méthodes de négociation dématérialisées, ou l’acceptation des signatures manuscrites scannées en lieu et place d’une signature électronique. En revanche, toutes les modifications substantielles comme celles qui toucheraient à la définition même de l’objet des prestations ou à l’allotissement seraient irrégulières.

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck