EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 28 – 13 JUILLET 2020
L’égalité, une volonté
Isabelle Rome

Elles représentent un peu plus de la moitié de la planète. Deux fois plus nombreuses à travailler qu’au début du siècle dernier, elles sont, dans la nouvelle génération, en France, plus diplômées que les hommes – un tiers de filles pour un quart de garçons de la même classe d’âge.
Pourtant, leur salaire y reste inférieur de vingt-quatre pour cent à celui des hommes et il n’y a toujours qu’une seule patronne d’un groupe du CAC 40. Elles constituent aussi les deux tiers de la magistrature française, mais un tiers des présidents et un quart seulement des procureurs des plus grands tribunaux. L’égalité entre les femmes et les hommes ne va décidément pas de soi.
Il faut la vouloir, toujours. La décréter, parfois. Insuffler son esprit, constamment. La vouloir n’est pas qu’une « affaire de femmes ». Dans son discours Sur l’admission des femmes au droit de cité , Condorcet fut l’un des pionniers de la parole féministe, en déclarant que les femmes devaient avoir des droits égaux aux hommes, ayant les mêmes qualités qu’eux.
C’est également un chef d’État, Emmanuel Macron, qui a déclaré – en 2017- l’égalité entre les femmes et les hommes grande cause du quinquennat. Voulue par le président de la République, élu au suffrage universel, l’égalité entre les femmes et les hommes est bien « l’affaire de tous ». Il faut aussi, parfois « bousculer » le temps. La loi ou des mesures incitatives – si ce n’est coercitives – peuvent s’avérer nécessaires pour accélérer une évolution des moeurs et des manières, à la peine, sur ce sujet. Ne doit-on pas aux lois sur la parité en politique les près de 40 % de femmes élues à l’Assemblée nationale, alors qu’elles n’étaient que 10 % en 1997 ? Idem, s’agissant de leur participation aux conseils d’administration des plus grandes entreprises qui a fait un bond en avant, en raison de dispositions légales similaires.
On pourrait rappeler les nombreuses lois intervenues pendant la seconde moitié du XXè siècle, émancipatrices des femmes, qu’il s’agisse de la reconnaissance de pouvoir travailler sans l’accord de leur époux, de la capacité à posséder un compte bancaire, de la possibilité de recourir à la contraception ou à l’avortement, et de bénéficier au sein de la famille des mêmes droits et prérogatives que leur conjoint.
Mais l’émancipation, si elle libère et institue l’égalité en droit, n’implique pas, de facto, une égalité réelle entre les femmes et les hommes. De même, si la loi permet de changer la donne, elle ne transforme pas totalement les mentalités. D’où la persistance d’inégalités.
Il faut donc, sans cesse et partout, insuffler la culture de l’égalité, et agir de telle sorte que cette dernière puisse exister.
C’est l’esprit de la mission confiée aux haut(e)s fonctionnaires, désigné(e) auprès de chaque ministère, afin de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est la tâche que j’assure, au sein du ministère de la Justice, depuis juin 2018. Insuffler la culture de l’égalité passe par la formation, la sensibilisation des personnels, et l’échange avec eux. L’égalité professionnelle doit se construire avec l’ensemble des forces vives de l’institution. Femmes et hommes. Parce qu’elle est un enjeu pour toutes et tous et parce qu’au-delà d’une égalité en droit, c’est une vie meilleure qu’elle peut nous promettre, à toutes et à tous.

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck