[EDITO] Transition juridique

EXTRAIT DE LA REVUE DE LA SEMAINE JURIDIQUE – DROIT – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 37 – 7 SEPTEMBRE 2020
Transition juridique

Deux millions. Le nombre de signatures recueillies en soutien à l’Affaire du siècle, cette requête déposée par quatre ONG sur laquelle le tribunal administratif de Paris devrait prochainement statuer, constituait déjà un signe. Dans le sillage des emblématiques affaires Urgenda aux Pays-Bas et Juliana aux États-Unis, la multiplication dans le monde des contentieux climatiques et environnementaux dessine désormais une tendance. Ce sont dans les prétoires que les organisations de la société civile poursuivent leur combat militant contre les États, les multinationales ou encore les investisseurs qui agissent en maître et possesseur de la nature. En cette rentrée qui nous somme d’apprendre à vivre avec la Covid-19, jamais les liens entre la précarisation des droits humains et les désordres environnementaux responsables de l’effondrement de la biodiversité n’auront été aussi tangibles. Les enjeux des désordres environnementaux, comme la protection des militants écologistes, se discutent désormais au sein des mécanismes internationaux de surveillance des droits de l’Homme. Le corps des droits humains constitue le cadre des réponses à apporter au défi de la résilience auquel nos sociétés sont confrontées. Candidate pour rejoindre le Conseil des Droits de l’Homme des Nations unies, la France peut être cette voix forte et assurée, capable de parler le langage de l’universel. Dans ce contexte tendu, se profile une transition juridique, aussi fertile que réjouissante. Fertile, ce mouvement conduit d’abord les juges à relire le corpus des droits humains, suivant une approche plus collective et transnationale qui revisite les concepts anciens de bien commun, de patrimoine commun et de public trust. En convoquant les droits les plus fondamentaux de l’Homme, les juges sont légitimes pour statuer sur l’inaction du législateur ou l’ineffectivité des politiques menées par l’exécutif, sans méconnaître la séparation des pouvoirs. Les contentieux climatiques demandent aussi de découvrir des obligations vis-à-vis des populations vulnérables. Du duty of care au droit de vivre dans un système climatique soutenable, il s’agit aussi d’en préciser les contours et la portée.

LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GENERALE

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