[LES ACTEURS] Violences conjugales et ordonnance de protection : changer d’échelle – 23 Novembre 2020

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE DU DROIT – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 48 – 23 NOVEMBRE 2020

Un an après le Grenelle contre les violences conjugales, une instance inédite a vu le jour : le Comité national de pilotage de l’ordonnance de protection. Son rôle, veiller à ce que la procédure civile d’urgence, récemment réformée, soit plus systématiquement actionnée. À la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre, sa présidente, Ernestine Ronai, une figure militante reconnue, rappelle qu’il s’agit concrètement de sauver des vies.

Créée il y a 10 ans pour lutter contre les violences au sein du couple, l’ordonnance de protection décidée par un juge aux affaires familiales reste un outil insuffisamment identifié, tant côté victimes, que côté magistrats et avocats. Pour comprendre, il convient de mettre en regard deux chiffres : 122 820 victimes ont été enregistrées par les services de police et de gendarmerie en 2018 selon les statistiques officielles publiées par l’Observatoire national des violences faites aux femmes, alors que les juridictions ont été saisies pour la même période de 3 332 demandes d’ordonnance de protection. « Même si le nombre de demandes a progressé en 2019 pour se hisser autour des 4 000, avec un taux d’acceptation de 64 %, le compte n’y est pas », déplore Ernestine Ronai. La présidente du nouveau Comité national de pilotage de l’ordonnance de protection (CNPOP), installé en juin dernier, rappelle pourtant que : « cette mesure civile permet aux victimes d’obtenir non seulement des mesures de protection judiciaire, comme l’interdiction faite à l’auteur des violences de s’approcher d’elles ou de les contacter, mais aussi de les accompagner dans le difficile parcours de sortie des violences conjugales, en leur attribuant par exemple la jouissance du logement commun ou l’exercice exclusif de l’autorité parentale ». Sans oublier que des avancées majeures viennent d’être obtenues grâce à la loi du 28 décembre 2019 qui ramène notamment le délai de délivrance de l’ordonnance de protection à 6 jours maximum à compter de la fixation de la date d’audience, contre une moyenne de 42 jours en 2016. « Ce n’est pas rien ! », s’exclame Ernestine Ronai. « Mais pour que les ordonnances de protection puissent se développer sur l’ensemble du territoire national, qui est l’objectif premier du CNPOP, encore faut-il que les règles soient mieux connues et mieux appliquées ». Ernestine Ronai a donc rassemblé au sein de cette nouvelle instance, rattachée au ministère de la Justice, des associations de protection des droits des femmes, des magistrats, des avocats et des huissiers de justice, soit 26 membres permanents, pour que les regards se croisent, les expériences s’additionnent et les solutions se partagent face aux difficultés rencontrées. « Seule une dynamique commune permettra de faire progresser les ordonnances de protection », assure-t-elle.

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