[Article] Données quantifiées, Atelier régional de jurisprudence : « Des effets de l’oisiveté du mari »

Extrait de la Revue : La Semaine Juridique Edition Générale n°26

 LA SEMAINE DU DROIT EN RÉGION

 

DIVORCE
768

 

Des effets de l’oisiveté du mari

CA Paris, pôle 3, ch. 3, 14 avr. 2016, n° 14/15188 : JurisData n° 2016-007169
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Benoit CASSOWITZ, rédacteur-analyste JurisData, membre de l’ARJ de Colmar

La question de l’oisiveté du mari constitue le thème central de cette décision rendue par la cour d’appel de Paris, en date du 14 avril 2016. En l’espèce, le divorce est prononcé aux torts partagés des époux. Le mari a prouvé l’adultère de son épouse en produisant les courriels de réservation de chambres d’hôtel qu’elle avait eu la malencontreuse maladresse de conserver sur l’ordinateur familial qui mémorisait le mot de passe de sa messagerie, accessible sans effraction. Pour sa part, le mari s’est complu dans l’oisiveté pendant la vie commune, et s’est abstenu, sans motif légitime, de toute participation aux charges du mariage. Si cette oisiveté résulte du choix personnel de l’intéressé qui ne peut soutenir avoir sacrifié sa carrière personnelle pour favoriser celle de son épouse et se consacrer à l’éducation des deux enfants communs, l’épouse ne peut cependant arguer que la disparité existante dans la situation des conjoints résulte uniquement du choix personnel du mari de cesser de travailler deux ans après la célébration du mariage. Une importante disparité de revenus existait en effet déjà alors que le mari gérait encore une société de courtage. C’est compte tenu de la durée du mariage (14 ans), de l’âge des époux (53 et 47 ans), de leurs ressources mensuelles (RSA d’un montant de 509 € pour le mari, salaire de 10 191 € pour l’épouse) et de leurs charges mensuelles respectives (193 € pour le mari, 6 035 € pour l’épouse), que la cour alloue au mari une prestation compensatoire d’un montant de 30 000 €. L’épouse n’ayant pu inclure dans ses charges la mensualité de 2 574 € due au titre d’un redressement fiscal de 39 000 € consécutif à l’établissement d’une déclaration de revenus conjointe avec son mari après l’ordonnance de non-conciliation, cette charge étant uniquement imputable à sa fraude. Si le mari bénéficie de la jouissance du pavillon familial en exécution de l’ordonnance de non-conciliation, et peut donc y héberger actuellement ses enfants, il va devoir le quitter alors qu’il ne dispose pas de ressources suffisantes pour louer un autre logement lui permettant de les accueillir. Le capital perçu au titre de la prestation compensatoire ne lui permettant pas non plus de les accueillir de façon pérenne, sa demande de transfert à son domicile de la résidence des enfants âgés de 16 et 13 ans est ainsi rejetée, même si ces derniers ont émis le souhait de vivre avec leur père. Enfin, l’impécuniosité du père est caractérisée, de sorte qu’il est dispensé du versement d’une contribution à leur entretien et à leur éducation.

La situation professionnelle et financière du mari ne résultant que de son propre comportement, l’équité consiste-t-elle à compenser l’inégalité économique entre les conjoints ou à faire supporter au mari les conséquences de son impéritie ?

 

 

LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 26 – 27 JUIN 2016

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