Extrait de la Revue : La Semaine Juridique Edition Générale n°3
ÉDITO
Jean Hauser
« Tout galimatias sociologique ou psychologique tend à devenir du droit, il est temps de revoir le bonhomme pour le conformer au droit post moderne. »
Depuis plusieurs années il n’y a plus de Saint Sylvestre, ou de circoncision, sans qu’une armée de Vadius ne nous expose les méfaits du Père Noël. Il oblige les parents à mentir (ce que les hommes ne font jamais autrement ?) et on a même lu qu’il rend les enfants violents quand ils découvrent la supercherie (voilà d’où vient la délinquance infantile : le père Noël !). Puisque tout galimatias sociologique ou psychologique tend à devenir du droit, on sent qu’il est temps de revoir le bonhomme pour le conformer au droit post moderne et, par la même occasion, éliminer son opposé, le père Fouettard, coupable de traitements inhumains et dégradants et de fessées désormais interdites. Que font donc les tribus gardiennes de l’orthodoxie ? On a voulu les aider.
Primo il viole la parité. Il n’y a pas de mère Noël et non plus de transgenre Noël. Il faut donc une loi pour imposer Noël sans aucune référence au sexe, ni à l’origine ou à la couleur et même à rien qui tienne à quelque chose. D’ailleurs ce vieillard cacochyme et valétudinaire serait, sans doute, candidat à la curatelle renforcée (avec toutes ces dépenses) mais pas à l’habilitation familiale, faute de famille (encore des dépenses de juges inutiles). Ensuite son statut social est douteux. Ne serait-il pas auto-entrepreneur avec donc un régime qui change chaque mois ? Et puis, avec une nuit de travail par an, pas de retraite, sauf à le classer parmi les (très) intermittents du spectacle. C’est un lapon, certes européen, qui a droit à la libre circulation, mais, comme le plombier polonais, il concurrence nos pères Noël nationaux, même si ce sont des ordures ! Quant à ses rennes qui sont des « êtres vivants doués de sensibilité » ils polluent (demandez comment aux vaches) et font fondre les glaciers : le véhicule électrique ou la circulation alternée, le 25 ou le 26. En droit de la consommation, doit-on croire qu’il lit les notices des joujoux en chinois et en petites lettres alors qu’il est atteint par la dégénérescence maculaire et, sans doute égrotant (bravo la CMU) ? De plus, il paraît se moquer de l’obsolescence programmée, même entre Noël et Jour de l’An. Enfin l’entreprise ne déclare aucun revenu mais des dépenses (considérables) et l’hypothèse de placements dans un paradis (fiscal) est plausible (aux Iles Vierges pour se réchauffer ?)
Mais alors, faut-il le remplacer par un docte exposé de nos besogneux Trissotins ? Comme les lois de ces dernières années protègent de plus en plus nos chérubins, et leur intérêt supérieur, contre l’individualisme, les droits à… (des autres), les parents peu scrupuleux, les excès du productivisme et en font des adultes dès leur naissance, qu’on doit informer du divorce de leurs parents (le père Noël du XXIe siècle, sans père Noël, comme la Loi sur la justice du XXIe siècle, sans juge), il ne leur reste que le rêve d’un autre monde. Il faut donc le sauver comme il est et même en étendre l’illusion aux grands. Beaucoup y croient et la preuve c’est que bientôt ils iront voter. « Loinde nous, cher lecteur, cette prétendue philosophie le jour de Noël ! Laissons-nous plutôt pénétrer le cœur par l’esprit de Noël, qui est l’esprit de l’activité utile, de la persévérance, de l’accomplissement joyeux, du devoir, de la bonté et de la tolérance ! ( Ch. Dickens, Récits pour Noël et autres, in La maison d’âpre vent : La Pléiade, 1979, p. 1080 ). On n’ose pas ajouter « et du bon droit », ce serait vraiment trop demander !
LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N°3 – 16 JANVIER 2017
La Semaine Juridique – Édition Générale
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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck