La jurisprudence dans le mouvement de l’open data
Ouverture – Allocution du Premier président Bertrand Louvel
La loi pour une République numérique a été promulguée le 7 octobre 2016 (L. n° 2016-1321) et publiée au Journal Officiel du 8 octobre. Désormais, un nouvel article L. 111-13 enrichit le Code de l’organisation judiciaire : « … les décisions rendues par les juridictions judiciaires sont mises à disposition du public à titre gratuit, dans le respect de la vie privée des personnes concernées… »1. Ce texte pose les termes du débat d’aujourd’hui. Au sein de cette salle historique, il nous invite à préparer l’avenir en nous appuyant sur l’expérience du passé et les connaissances d’aujourd’hui. Le XXe siècle a connu la révolution informatique. Les méthodes de travail dans les juridictions ont été renouvelées. Le traitement de texte a modifié le rôle du greffe. Il a fait évoluer la rédaction des décisions. La plume a fait place au clavier. Le développement d’Internet a transformé le regard du justiciable sur le droit. Il a facilité l’accès à la législation et aux décisions des cours suprêmes. Il a modifié la recherche juridique. Il a permis la dématérialisation des procédures et de la communication avec les auxiliaires de justice. Le papier cède la place aux écrans. Le XXIe siècle doit se préparer à une nouvelle révolution : l’open data. Il peut être défini comme la mise à disposition des données non personnelles détenues par une personne morale ou institutionnelle dans un format facilement exploitable.
Dès le début du siècle, la directive européenne du 17 novembre 20032 a posé le principe de la liberté de réutilisation des données publiques, étendant l’ouverture initialement prévue par la loi du 17 juillet 19783. L’idée vient des États-Unis. Depuis 1966, toute personne peut solliciter auprès d’une agence fédérale, la transmission des données ou documents la concernant. Internet a amplifié les possibilités pratiques d’une telle demande. En mai 2009, le site « data. gov » était créé outre-Atlantique. En France, deux ans plus tard, le 5 décembre 2011, la mission « Etalab »4 ouvrait sur ce modèle le site « data.gouv.fr » rassemblant l’ensemble des données publiques disponibles. L’open data est né d’un souci de transparence, de modernisation de l’action publique et de soutien au dynamisme économique. Son développement va engendrer un bouleversement de la culture judiciaire (1) qu’il revient à la Cour de cassation d’appréhender (2).
1. Un bouleversement de la culture judiciaire
L’accès à l’ensemble de la production judiciaire va modifier la conception même de la jurisprudence. « Dans un sens vague archaïsant, la jurisprudence est la science du droit. Dans un sens technique, aujourd’hui le plus courant, on entend par jurisprudence la solution généralement donnée par les tribunaux à une question de droit » écrivait le doyen Carbonnier. Parce qu’en son cœur est le droit, la jurisprudence est principalement établie et connue aujourd’hui à partir des décisions des hautes juridictions.
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La Semaine Juridique – Édition Générale – Supplément au N°9, 27 février 2017 à télécharger gratuitement
La jurisprudence dans le mouvement de l’open data
Actes du colloque à la Cour de cassation 14 octobre 2016
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