Recours en révision et intérêt à agir né et actuel

La Semaine Juridique Edition Générale n°15

LA SEMAINE DU DROIT CIVIL ET PROCÉDURE CIVILE

 RÉVISION

Recours en révision et intérêt à agir né et actuel

Mélina Douchy-Oudot, avocat, professeur à l’université de Toulon

Cass. 2 e civ., 23 mars 2017, n° 16-10.647, P+B : JurisData n° 2017-005070

À l’occasion d’élections professionnelles, un tribunal d’instance est saisi par un syndicat contestant la décision de refus de la commission d’organisation électorale d’enregistrement d’une liste de candidats. L’article R. 4031-31, alinéa 4, du Code de la santé publique permet, dans les trois jours de la notification de la décision, sa contestation devant le tribunal d’instance. Le tribunal annule la décision mais seulement sur le refus d’enregistrement de l’une des  candidatures qu’il déclara valide.
Un recours en révision ( CPC, art. 595 ) est formé par l’agence régionale de santé  (ARS) au motif que le candidat en cause n’avait jamais donné ni son aval ni sa signature à cette candidature. Cet élément n’étant pas connu du tribunal, la révision de  la décision est demandée. Le recours est déclaré irrecevable au motif que : « le candidat figurant sur la liste présentée par la Fédération syndicale l’Union collégiale n’a pas été élu et qu’il n’est pas établi que cette candidature, à la supposer irrégulière, ait été de nature à affecter la sincérité du scrutin ».  La cassation de cette décision est l’occasion de rappeler deux points importants  du recours en révision. En premier lieu, ce n’est pas la révision des élections qui est demandée, mais la  révision de la décision du tribunal. La fraude est celle commise à l’égard du juge  qui a, sur le fondement de l’élément frauduleux, rendu sa décision. Peu importe  l’irrégularité de la candidature, c’est le fait que cette irrégularité n’ait pas été  connue du tribunal qui justifie le recours. C’est donc bien la révision de la décision  rendue au sens de l’article 595 du Code de procédure civile qui était demandée  et non la révision des élections.
En second lieu, la recevabilité d’un recours ne saurait s’apprécier à partir du fond  du litige. L’ARS avait-elle encore un intérêt à cette révision ? C’est sur ce point  qu’ont raisonné les premiers juges. On entend bien dans les faits l’argumentation  du tribunal d’instance consistant à dire que le candidat, dont la candidature avait  été déclarée valide par lui, avait pu figurer sur les listes électorales, mais que  n’ayant pas été élu, peu importait a posteriori que sa candidature ait été régulière ou non. Ce qui par motif rapporté dans le pourvoi, les conduit à soutenir  « qu’à ce stade des opérations électorales, l’ARS de Basse-Normandie ne justifie  plus d’un intérêt actuel à obtenir l’invalidation de cette candidature, la reconnaissance judiciaire d’une situation de fraude ne pouvant plus emprunter cette voie  de droit ». Il ne s’agit plus ici des conditions propres au recours en révision, mais des conditions générales de toute action en justice au sens de l’article 31 du Code de procédure civile, parmi lesquelles l’intérêt à agir. C’est sur ce point que la décision du tribunal d’instance est cassée par mauvaise appréciation de cet intérêt.
Au visa des articles R. 4031-31 du Code de la santé publique et 595 du Code de procédure civile, la Cour rappelle que « pour apprécier la recevabilité du recours  en révision, la juridiction saisie ne peut examiner l’intérêt, au jour où elle statue, de se prononcer sur le fond du litige tranché par le jugement dont la rétractation
est demandée ».

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LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N°15  – 10 AVRIL 2017

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck

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