Agnès Arcier, militante du progrès

La Semaine Juridique Edition Générale n°19-20

LA SEMAINE DU DROIT LES ACTEURS

Agnès Arcier, militante du progrès

Agnès Arcier est, depuis le 3 mars, présidente de la Fédération des femmes administrateurs (FFA), un regroupement de réseaux professionnels de femmes exerçant des responsabilités dans les métiers du droit, du chiffre et du secteur public, dont la présidence est assurée à tour de rôle. Cette haut fonctionnaire prend la suite de l’avocate Brigitte Longuet.

Fondatrice du réseau « Administration moderne, association interministérielle de femmes hauts fonctionnaires », Agnès Arcier, diplômée de l’ESSEC et ancienne élève de l’ENA, est administratrice générale des finances publiques au sein du ministère de l’Économie et des Finances. Et féministe ? Plutôt « militante du progrès ». Comprendre : « il ne s’agit pas de militer pour l’égalité, beaucoup d’associations sont déjà investies, mais de s’engager en faveur du progrès avec la mixité comme levier. Le sujet est celui de la modernisation de la société ». Un message porté par des réseaux de femmes. Créée en 2012, la FFA, qui compte une vingtaine de réseaux membres associés, dont les réseaux fondateurs d’experts-comptables, d’avocats, de juristes, d’huissiers de justice, et de hauts fonctionnaires, poursuit une démarche de communication et de lobbying « pour des instances de gouvernance modernes ». Pour avoir le droit à la parole et une force collective, Agnès Arcier a fondé un premier réseau féminin en 1998. « Nous pensions différemment les réformes nécessaires au sein de l’État, en privilégiant le management, qui était catastrophique ». Fin 1990/début 2000, la cause des femmes était un sujet qui montait. Agnès Arcier, membre de l’Observatoire de la parité, fonde ESSEC au féminin, puis crée avec des collègues Grandes Écoles au féminin et publie en 2002 « Le quotient féminin de l’entreprise », une réflexion sur le lien entre mixité et performance, visant à montrer que « la diversité apporte un enrichissement et un fonctionnement plus adapté à la réalité économique ». Cette prise de parole en tant que femme est un leitmotiv du parcours d’Agnès Arcier. Ses premières « irritations personnelles » remontent à sa sortie de l’ENA en 1986 lorsque son classement l’affecte au ministère des Finances à la section du financement des exportations d’armement. « C’était panique à bord, il n’y avait jamais eu de femmes dans l’équipe ». Puis alors qu’elle brigue un poste au Japon où elle a fait son stage d’ambassade quand on lui répond « Une femme vous n’y pensez pas ». Elle y restera 5 ans missionnée par le ministère de l’Économie, avant de devenir directrice de cabinet de la secrétaire d’État chargée du Commerce extérieur sous Alain Juppé. « Les jupettes comme on les appelait ». Ce qui en dit long. La haut fonctionnaire rejoint ensuite le ministère de l’Industrie, elle est à plusieurs reprises administrateur d’importants établissements publics. Cette femme énergique, mère de 2 filles, est viscéralement attachée à l’égalité des chances, « peut-être parce que je suis un produit de 3 e génération de la méritocratie façon III e République ». Avec une mère institutrice devenue capétienne et un père cadre sup à la SNCF par concours interne, elle est la première de la famille à faire l’ENA.
Et s’engage. Les lois sur les femmes sont « de longs combats ». Parmi les victoires : en politique, la loi du 6 juin 2000 qui oblige à des listes paritaires aux municipales. Et la loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 enjoignant les sociétés cotées à atteindre 40 % de femmes dans les conseils d’administration d’ici à 2017, un objectif presque atteint pour les grandes sociétés. Dans la fonction publique, « on restait dans l’illusion qu’il n’y avait pas de sujet, avant la loi Sauvadet du 12 mars 2012 sur la mixité, pour laquelle on attend toujours les décrets d’application concernant les conseils d’administration des établissements publics ». Entre affichage politique et progrès réel, Agnès Arcier estime l’air du temps plutôt favorable. Mais si l’évolution en France en matière d’égalité va dans le bon sens, l’environnement mondial est préoccupant, or « les crises économiques ne sont jamais favorables aux femmes ». La FFA veut continuer à souligner le lien entre mixité et performance, et « convaincre les entreprises petites et moyennes de l’intérêt économique d’une gouvernance équilibrée et durable ». Il y a les batailles gagnées et les combats, encore nombreux, à mener.

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LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N°19-20  – 8 MAI 2017

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck

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