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LE MOT DE LA SEMAINE
EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 18 – 4 MAI 2020
AMF
Jurisprudence de l’AMF, le monopole de la Commission des sanctions
Frédéric Peltier, avocat Peltier Juvigny Marpeau & Associés, expert du Club des juristes

Cumulant le pouvoir de réglementer, d’autoriser, de contrôler et de sanctionner, la tentation de l’AMF est de faire un tout de ses prérogatives comme source de droit. C’est une véritable oeuvre de pédagogie normative qu’elle revendique en donnant un caractère universel à toutes ses décisions, qu’elle présente comme sa jurisprudence. C’est ainsi que la frontière entre la doctrine administrative et la jurisprudence de l’AMF se superposent et s’entremêlent ( Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF, 2 févr. 2018 : https://doctrine.amf-france.org/Reglementation/Doctrine/Principes-de-doctrine ).
La décision de sanction est néanmoins la seule source de jurisprudence de l’AMF. La motivation des décisions de la Commission des sanctions permet souvent de découvrir ce que la lecture des dispositions légales et réglementaires ne révèle pas de manière évidente.
Mais depuis la loi n° 2010-1249 de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010, la composition administrative a été instaurée comme alternative à l’ouverture d’une procédure devant la Commission des sanctions. Cette transaction était initialement limitée aux manquements des professionnels, elle a vu son champ d’application étendu aux abus de marché par la loi n° 2016-819 du 21 juin 2016. Désormais, l’ensemble des manquements susceptibles d’être sanctionnés peuvent donner lieu à une alternative négociée.
Rappelons qu’en application de l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier, le Collège de l’AMF peut décider d’ouvrir une procédure de sanction administrative. Pour ce faire, il notifie des griefs à la personne mise en cause. En parallèle, il peut adresser à ce dernier une proposition d’entrée en voie de composition administrative ( C. mon. fi n., art. L. 621-14-1 ). Si le mis en cause accepte cette alternative, l’accord transactionnel
passé avec le Secrétaire général de l’AMF doit être validé par le Collège, puis homologué par la Commission des sanctions. L’AMF est très favorable à la transaction. Elle loue sa rapidité et souligne son efficacité « pédagogique ». Les accords sont publiés, et la position de l’autorité sur les manquements constatés, même si elle ne vaut pas reconnaissance de culpabilité, fait autorité. L’AMF n’hésite pas, au demeurant, à se référer à des compositions administratives pour illustrer la façon dont il faut appliquer les normes. L’arrêt du Conseil d’État du 20 mars 2020 ( CE, ass., 20 mars 2020, n° 422186, Président de l’Autorité des marchés financiers et Sté Arkéa Direct Bank : JurisData n° 2020-003904 ) vient de poser une barrière sérieuse à une telle pratique.

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck