[Article] Fin de vie : les précisions réglementaires

Extrait de la Revue : La Semaine Juridique Edition Générale n°36

LA SEMAINE DU DROIT – PUBLIC ET FISCAL

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SANTÉ PUBLIQUE
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Fin de vie : les précisions réglementaires

Jean-Philippe Vauthier, docteur en droit, responsable scientifique SFR-ASMES, CHU de Montpellier, chercheur associé à l’Institut François Gény (EA 7301) – université de Lorraine 

D. n° 2016-1066, 3 août 2016 : JO 5 août 2016, texte n° 40 D. n° 2016-1067, 3 août 2016 : JO 5 août 2016, texte n° 41 A. 3 août 2016 : JO 5 août 2016, texte n° 49

Datés du 3 août 2016 et publiés au Journal Officiel du 5 août 2016, trois textes, deux décrets et un arrêté, sont venus compléter le dispositif
mis en place par la loi du 2 février 2016 « créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fi n de vie » ( L. n° 2016-87 :
JO 3 févr. 2016 ; JCP G 2016, doctr. 240, P. Mistretta ; RGDM 2016, n° 59, p. 87, F. Vialla ) et apportent d’utiles précisions aux praticiens et patients quant aux situations de fin de vie.
S’agissant des directives anticipées, qui s’imposent désormais au médecin ( C. santé publ., art. L. 1111-11, al. 3 ), le décret n° 2016-1067 donne diverses indications quant à leur contenu et aux modalités de leur conservation. L’article R. 1111-18 modifié du Code de la santé publique détaille désormais les mentions devant y figurer (éléments d’identification ; volontés de la personne quant à sa fi n de vie ; une rubrique spécifique à la sédation profonde et continue ; et une partie relative à la révision ou la révocation des directives anticipées)
et prévoit l’établissement d’un modèle devant être formalisé par arrêté du ministre chargé de la Santé. L’annexe de l’arrêté du 3 août offre ainsi deux modèles distincts de directives anticipées, selon que la personne pense ou non être proche de sa fi n de vie, notamment si elle est atteinte d’une maladie grave. Le cas échéant, la spécificité notable tient à ce que la personne peut préciser davantage ses volontés concernant certains actes, distinguant ceux qui pourraient être entrepris et ceux qui ont déjà été mis en oeuvre dans le cadre de sa prise en charge.
Afi n de rendre les directives anticipées « aisément accessibles », l’article R. 1111-19 modifié du Code de la santé publique élargit l’éventail des supports possibles à leur conservation. La personne peut en outre décider de les déposer et conserver dans son dossier médical partagé ; elles peuvent être conservées par un médecin de ville, dans le dossier médical en cas d’hospitalisation, ou dans le dossier de soins en cas d’admission dans un établissement médico-social ; l’auteur des directives anticipées peut encore les conserver lui-même ou les confier à la personne de confiance, un membre de sa famille ou un proche. Tout établissement de santé ou médico-social se doit par ailleurs d’interroger les personnes qu’il accueille sur l’existence de telles directives.
L’apport du troisième texte, le décret n° 2016-1066 , concerne le déroulement de la procédure collégiale. Lorsqu’elle est mise en oeuvre dans le cas où le médecin juge que les directives anticipées sont manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient ( C. santé publ., art. L. 1111-11, al. 4 ), alors « le médecin recueille l’avis des membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et celui d’au moins un médecin, appelé en qualité de consultant, avec lequel il n’existe aucun lien de nature hiérarchique. Il peut recueillir auprès de la personne de confiance ou, à défaut, de la famille ou de l’un des proches le témoignage de la volonté exprimée par le patient » ( C. santé publ., art. R. 4127-37-1, III ).
Dans les autres situations (l’arrêt ou la limitation de traitements inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie lorsque la personne est hors d’état de s’exprimer : C. santé publ., art. L. 1110-5-1, al. 1 ; art.
L. 1111-4, al. 6 ; et la mise en oeuvre d’une sédation profonde et continue : C. santé publ., art. L. 1110-5-2, al. 5 ), la procédure est globalement la même ( C. santé publ., art. R. 4127-37-2, III ; art. R. 4127-37-3, II, al. 2 ) à la différence près qu’il ne s’agit pas d’un simple recueil d’avis mais d’une « concertation » avec l’équipe de soin si elle existe, et que l’avis de la personne de confiance ou à défaut, de la famille ou d’un proche le demande sur la volonté exprimée par le patient doit ici être recueilli en amont ( C. santé publ., art. R. 4127-37-2, I ). La procédure collégiale peut être engagée à l’initiative du médecin en charge du patient. Mais ce dernier sera tenu de le faire si la personne de confiance ou à défaut, la famille ou un proche le demande ( C.santé publ., art. R. 4127-37-2, II ).
Dans tous les cas, les décisions de refus d’application des directives anticipées, de limitation ou d’arrêt de traitement, et de recours à une sédation profonde et continue, doivent être motivées et inscrites, ainsi que leurs motifs et les avis recueillis, dans le dossier du patient ( C. santé publ., art. R. 4127-37-1, IV ; art. R. 4127-37-2, IV ; art. R. 4127-37-3, II, al. 4 ). En outre, la personne de confiance ou à défaut, la famille ou un proche doit être informé de cette décision.

 

LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 36 – 5 SEPTEMBRE 2016

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