Extrait de la Revue : La Semaine Juridique Edition Générale n°16
LA SEMAINE DU PRATICIEN INFORMATIONS PROFESSIONNELLES
UNION EUROPÉENNE
« L’appartenance à l’Union européenne … une Europe de valeurs communes dont la mise en commun démultiplie la force de projection »
3 questions à Michel Petite, of counsel Clifford Chance, ancien directeur général du service juridique de la Commission
européenne
Dans le contexte actuel marqué par la décision du Royaume-Uni de quitter l’Union européenne et à l’heure où la méthode d’intégration progressive propre à la construction européenne constitue un point de critique, Michel Petite, spécialiste de la formation du droit européen apporte son éclairage sur les défis auxquels l’Union européenne, qui célèbre cette année le 60 e anniversaire du Traité de Rome, doit répondre.
Que répondez-vous aux principales critiques – élargissement, dilution, déficit démocratique – formulées envers l’Union européenne ?
L’Europe a bien changé depuis sa naissance sur les décombres de la 2e guerre mondiale. Le succès du « projet » quasi-expérimental dans le secteur du charbon et de l’acier l’a transformé en un mode de gouvernance unique au monde. Il s’est progressivement étendu à tous les secteurs économiques, mais aussi à nos droits de citoyens, à notre liberté de circuler et à nos droits civils. Et elle a attiré de nouveaux membres. Gardons-nous de l’illusion que tout était mieux avant : l’Europe a connu des périodes de sérieuse stagnation dans les années 70 et début des années 80, alors qu’elle ne comportait que 9, puis 10 membres avec la Grèce. Lorsqu’est évoquée la « dilution » due aux élargissements, on pense le plus souvent à ceux intervenus à l’est, qui en 2004 puis 2007 ont porté l’Union de 15 à 27 membres. Mais sur ce point, l’histoire a déjà jugé : la chute du mur et l’ouverture vers l’ouest de pays autrefois intégrés à l’URSS ont ouvert une fenêtre d’opportunité qui a permis au continent européen de se réunifier. Cette fenêtre est refermée, et si cela n’avait pas été fait à l’époque, ce n’est pas aujourd’hui que les pays baltes par exemple pourraient rejoindre l’Union… On ne peut nier que les élargissements aient un effet mécanique de dilution de la capacité de décision : il est beaucoup plus difficile d’obtenir un consensus à 28 qu’à 9. Néanmoins, il faut considérablement relativiser cet effet :
– en premier lieu parce que tous les amendements au Traité de Rome, intervenus en série depuis 1986 (Acte Unique, traités
de Maastricht, d’Amsterdam, de Nice, de Lisbonne), ont eu pour l’un de leurs objectifs de pallier cette dilution. Ils l’ont fait en généralisant progressivement la prise de décision au Conseil à la majorité qualifiée. À l’heure actuelle, il ne reste plus que très peu de décisions qui requièrent l’unanimité des États membres. Là où elle subsiste, comme dans le domaine fiscal, on voit bien les énormes difficultés d’aboutir à des résultats ;
– en deuxième lieu, parce que les nouveaux membres sont loin d’être nécessairement ceux qui freinent l’Union européenne. Ils ont souvent l’enthousiasme de
nouveaux convertis, associé à l’effet bénéfique des fonds structurels, et à la proximité d’une Russie qui leur rappelle que les alternatives à l’UE sont peu attractives.
Pologne, République tchèque, Hongrie, ont ou ont eu des parcours plus disparates, Bulgarie et Roumanie restent engluées dans de sérieux problèmes internes.
Mais dans l’ensemble, on ne peut pas dire qu’ils sont ceux par qui l’Union européenne ferait du surplace. Les freins les plus efficaces proviennent le plus souvent de désaccords franco-allemands ou de positions britanniques. Quant au « déficit démocratique » , il doit bien exister puisque tout le monde en parle ! Pourtant force est de constater que, là encore au fil des révisions des Traités adoptées depuis trente ans, un système cohérent est désormais en place :
– montée en puissance du Parlement européen, qui est élu au suffrage universel, et qui agit en plein co-législateur avec le Conseil. Il contrôlait déjà l’exécutif (la Commission européenne, qu’il peut censurer), il en élit aujourd’hui le Président sur proposition du Conseil européen (depuis le Traité de Lisbonne). (…)
Retrouvez la suite de l’article dans La Semaine Juridique Édition Générale N°16, 17 Avril 2017
LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N°16 – 17 AVRIL 2017
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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck