EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 9-10 – 4 MARS 2019
Edito
Femmes, droit, et égalité
Nicole Belloubet

On rapporte que la première professeure de droit, Bettizia Gozzadini, avait dû se déguiser en homme afin de suivre les cours de l’université de Bologne, avant d’en devenir docteure en 1236.
Plusieurs siècles plus tard, Jeanne Chauvin fut la première, à revêtir, en France, une robe d’avocat, en 1901. Et c’est à la fin de la seconde guerre mondiale, après l’octroi du droit de vote aux femmes en 1944 que la magistrature s’ouvrit enfin à elles, en 1946.
Charlotte Bequignon-Lagarde, nommée alors à la Cour de cassation, n’y sera rejointe par aucune autre magistrate, au cours des dix-neuf années qu’elle y passa. Si les jeunes filles sont majoritaires dans les facultés de droit et si plusieurs professions juridiques sont aujourd’hui féminisées ou en passe de le devenir, ce n’est donc pas sans embûches que les femmes ont eu accès à celles-ci. Les droits nouveaux qui leur ont été reconnus, tout au long du siècle dernier, ont été, à cette fin, un moteur puissant pour elles.
Comme dans de nombreux secteurs d’activité, des inégalités persistent cependant entre les femmes et les hommes, surtout aux postes les plus élevés. C’est aujourd’hui l’égalité réelle qu’il faut atteindre.
Déclarée grande cause du quinquennat par le chef de l’État, l’égalité femmes/hommes constitue l’une des priorités du ministère de la Justice. J’ai, à ce titre, nommé une haute fonctionnaire à plein temps, en la personne de la magistrate Isabelle Rome, à qui j’ai remis, en juin 2018, une feuille de route très précise.
La publication du premier baromètre de l’égalité femmes/hommes constitue une étape importante en termes de visibilité de la carrière des femmes. Très détaillé, cet outil en souligne la progression, mais aussi les points de blocage, notamment à travers la subsistance d’un plafond de verre. Les leviers à actionner pour une égalité plus effective y sont présentés. Ils seront prochainement mis en oeuvre.
Parce que la culture de l’égalité doit également être insufflée à tous les niveaux, je viens de lancer un « texte d’engagement pour une parole non sexiste », reprenant une série de recommandations, invitant à mieux dire pour mieux agir. Adopté le 7 mars à la Chancellerie par de premières structures signataires, il aura vocation à être décliné sur l’ensemble du territoire.
Attachée à l’image d’impartialité de la justice, je souhaite également que la mixité puisse être réintroduite dans la magistrature. Nous avons sollicité, avec Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, une étude auprès du Conseil national du droit à ce sujet. Des expérimentations de partenariat entre des cours d’appel et des facultés de droit seront également menées, dans cet objectif…

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck