[Edito] Le « grand gagnant » de la déjudiciarisation est… le notaire

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE NOTARIALE ET IMMOBILIERE N°14, 5 AVRIL 2019

Le « grand gagnant » de la déjudiciarisation est… le notaire

David Boulanger, maître de conférences à la faculté de droit de l’université d’Artois, directeur du Cridon Nord-Est

Déjudiciariser et recentrer les juridictions sur des missions contentieuses ou des tâches qui appellent une intervention judiciaire, tels sont les objectifs de la loi du 23 mars 2019 (V. JCP N 2019, n° 14, 1155-1161). Son spectre est large. Il englobe le droit civil et le pénal, en passant par les régimes de compétences judiciaire et administrative. Si on s’arrête aux nouveautés en droit civil, le « grand gagnant » de la déjudiciarisation est… le notaire. Depuis le 25 mars, il a dû faire évoluer sa pratique. Dès le 29, le ministère de la Justice a diffusé une circulaire datée du 25, présentant les entrées en vigueur des dispositions civiles (V. JCP N 2019, n° 14, act. 370). On en déduit que la déjudiciarisation est applicable aux instances en cours qui aboutiront à une décision de non-lieu, compte tenu de l’effet immédiat de la loi. Sur les aspects de droit de la famille, la réforme aboutit à ce que le juge s’éloigne des usagers, au profit du notaire. Nombre de dispositions sont d’application immédiate et des missions traditionnellement judiciaires sont définitivement reportées sur le notariat. Cette révolution n’aura assurément pas manqué de surprendre. Les praticiens se voient confier de nouvelles taches, du jour au lendemain, sources de responsabilités ! Le législateur a précisé que les règles s’inscrivent dans la continuité de leurs missions actuelles. Mais les nouveautés sont réelles, qu’il s’agisse de dresser l’acte de notoriété en matière de filiation, de recueillir le consentement. Le « grand gagnant » de la déjudiciarisation est… le notaire du couple ayant recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneurs, ou avec accueil d’embryon… Plus spectaculaire, on assiste à la disparition de l’immutabilité du régime matrimonial. Exit le délai de 2 ans ou l’homologation judiciaire systématique en présence de mineurs. Une mission particulière en résulte pour le notaire : dans l’administration légale, il peut saisir le juge des tutelles… Simple faculté, mais dont on se demande quand il va l’exercer. En cas de risque d’atteinte aux intérêts patrimoniaux de l’enfant…

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AUTEUR(S) : Conseil scientifique : Ch. Blanchard, H. Bosse-Platière, C. Brenner, G. Durand-Pasquier, M. Julienne, L. Leveneur, M. Mekki, P. Murat, S. Piedelièvre, Ph. Pierre, F. Terré. Comité d’experts : D. Boulanger, M.-F. Zampiero Bouquemont, E. Clerget, F. Collard