Égalité de traitement

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 19 – 13 MAI 2019

LA SEMAINE DE LA DOCTRINE LA VIE DES IDÉES

LE MOT DE LA SEMAINE

Égalité de traitement

L’équilibre compromis par la Cour de cassation

Bruno Serizay, avocat associé, Capstan Avocats, partenaire du Club des juristes

Entre 2008 et 2013, la Cour de cassation a rendu une série d’arrêts interdisant que des avantages sociaux puissent être accordés, y compris par accord collectif, à certaines catégories de salariés. Ainsi était-il impossible d’attribuer des tickets restaurant aux employés sans les accorder aux cadres (Cass. soc., 20 févr. 2008, n° 05- 45.601 : JurisData n° 2008-042839) ou des repos spécifiques aux cadres sans les accorder aux employés (Cass. soc., 1 er juill. 2009, n° 07-42.675 : JurisData n° 2009-048964). Cette quête d’égalitarisme a été stoppée par une succession d’arrêts entre 2013 et 2018 validant les avantages catégoriels de protection sociale (Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-20.490 : JurisData n° 2013-004094) puis créant une présomption de justification des avantages catégoriels instaurés par accord collectif (Cass. soc., 27 janv. 2015, n° 13-22.179 : JurisData n° 2015-000848 ). La Cour consacrait alors l’autorité des partenaires sociaux (les employeurs et les organisations syndicales représentatives), agissant sur délégation expresse du législateur, dans l’exercice du droit constitutionnel reconnu par le 8 e point du Préambule de la Constitution aux salariés de participer à la détermination de leurs conditions de travail par le biais de leurs représentants. L’accord collectif devenait ainsi le garant de l’égalité catégorielle. La frustration des promoteurs de l’égalitarisme était grande ; celle de ceux considérant que l’attribution d’un véritable pouvoir normatif aux signataires des accords collectifs constituait une intolérable atteinte à l’autorité judiciaire l’était encore plus. Ensemble, les thuriféraires de l’égalitarisme veillaient ; ils viennent de se réveiller. Le 3 avril 2019, sous l’égide de son nouveau Président, la chambre sociale de la Cour de cassation a condamné, tel un grand pas en arrière, les avantages catégoriels instaurés par accord collectif. Le motif officiel est que la généralisation de la présomption de justification des avantages catégoriels serait contraire au droit communautaire et spécifiquement aux articles 20 et 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (V. aussi dans ce numéro JCP G 2019, 519 et 520, notes G. Vachet et J. Daniel).

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck