EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 5 – 3 FÉVRIER 2020
LA SEMAINE DU PRATICIEN EN QUESTIONS
La réforme de la retraite des avocats, état des lieux
Après avoir fait l’objet d’un avis critique du Conseil d’État, le projet de loi instituant un système universel de retraite (Projet de loi n° 2623, 24 janv. 2020) est examiné à l’Assemblée nationale (V. dans ce numéro JCP G 2020, act. 135). Un état des lieux permettra d’identifier les principaux points techniques qui animeront les débats parlementaires en ce qui concerne plus particulièrement la retraite des avocats.
Guillaume Hannotin, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation

Quelles sont les principales caractéristiques du futur régime universel de retraites concernant les avocats ?
Les avocats ont vocation, comme tous les autres actifs, à rejoindre le régime universel de retraite. À terme, les avocats ne seront plus affiliés à la CNBF mais à la « Caisse nationale de retraite universelle ». C’est cette caisse nationale qui percevra les cotisations et liquidera les pensions des avocats comme celles des autres actifs. Un « compte personnel de carrière » sera ouvert au nom de chacun dans les livres de la Caisse nationale de retraite universelle. Ce compte retracera les points « acquis », par le versement des cotisations, tout au long de la vie professionnelle. À la retraite, la multiplication du nombre de points inscrits au crédit du compte par la « valeur de service » du point donnera la prestation due à l’assuré. Il est prévu que les cotisations s’élèvent à 28,12 % des revenus compris entre 0 € et 40 000 €, à 12,94 % pour les revenus entre 40 000 € et 120 000 €. Au-delà de 120 000 €, les avocats, comme tous les autres actifs, seront astreints au paiement d’une cotisation de solidarité de 2,81 %, sans contrepartie. Dans ce schéma, la situation de l’avocat ne se distinguera de celle des salariés que sur un point : pour tenir compte de la circonstance que l’avocat, comme le travailleur indépendant, n’a pas d’employeur qui pourrait verser la part « employeur » de la cotisation retraite, la cotisation retraite « à taux plein » (28,12 %) ne portera que sur la première tranche des revenus de l’avocat (de 0 à 40 000 €). Logiquement, s’agissant d’une retraite par points, cette moindre cotisation de la part de l’avocat donnera lieu à une moindre acquisition de droits à prestation à la retraite par rapport à un salarié ayant des revenus équivalents.
Quelles sont les difficultés posées par ce nouveau système, au cas particulier des avocats ?
Le principal inconvénient du nouveau système est que la moitié des avocats qui gagnent moins de 40 000 € verra ses cotisations doubler, tandis que la retraite minimale des avocats va baisser de plus du tiers. Le régime actuel des avocats se caractérise par une très forte solidarité, avec des taux de cotisation progressifs et une prestation minimale élevée par rapport aux autres systèmes. Avec le projet de loi, cette solidarité professionnelle sera détruite. Pour tenter d’amortir le choc, le projet de loi ouvre la possibilité
à la CNBF de financer l’attribution de points supplémentaires aux avocats les plus modestes. Cette solution n’est pas pleinement satisfaisante, et ce à deux égards…

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