[En questions] Le contentieux du TEG : état des lieux d’un contentieux évolutif à l’aube de la réforme

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 5 – 4 FÉVRIER 2019

LA SEMAINE DU PRATICIEN EN QUESTIONS

TAUX EFFECTIF GLOBAL

Le contentieux du TEG : état des lieux d’un contentieux évolutif à l’aube de la réforme

Philippe Metais, avocat associé, White & Case LLP
Élodie Valette, avocat, White & Case LLP

Le contentieux du Taux effectif global (TEG) continue de se renouveler et de donner lieu à des clarifications de la part de la jurisprudence. À l’heure de la réforme, le prononcé d’une sanction proportionnée à l’erreur commise au détriment de l’emprunteur semble enfin se dessiner conformément aux principes essentiels de la responsabilité civile et des textes européens.

Quelles sont les règles de prescription applicables au TEG erroné ?

Si les tribunaux sont submergés par les actions en contestation de l’exactitude du TEG, les actions menées sur le fondement de la nullité de la stipulation de l’intérêt conventionnel et de la déchéance du droit aux intérêts demeurent soumises à la prescription. Depuis la réforme du droit des obligations résultant de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil trouve application en matière d’action en nullité. Le point de départ de la prescription coïncide avec la date de la convention support du TEG critiqué lorsque les éléments intrinsèques de cette dernière permettent à l’emprunteur de prendre connaissance de l’erreur alléguée (Cass. 1 re civ., 11 juin 2009, n° 08-11.755 : JurisData n° 2009-048470. – Cass. com., 7 févr. 2012, n° 11-10.833 : JurisData n° 2012-001699. – Cass. 1 re civ., 16 avr. 2015, n° 14-17.738 : JurisData n° 2015-008435. – Cass. 1 re civ., 6 avr. 2016, n° 15- 12.495, inédit. – Cass. 1 re civ., 14 avr. 2016, n° 15-14.760, inédit. – Cass. 1 re civ., 1 er mars 2017, n° 15- 16.819 et 16-10.270 : JurisData n° 2017-003561. – Cass. 1 re civ., 22 juin 2017, n° 16-17.574, inédit. Cass. 1 re civ., 6 déc. 2017, n° 16-20.234. – Cass. 1 re civ., 31 janv. 2018, n° 16-22.945, inédit. – Cass. 1 re civ., 1 er févr. 2018, n° 16- 26.679, inédit. – CA Paris, 19 déc. 2018, n° 16/25325). En présence de multiples griefs, il n’y a pas lieu de reporter le point de départ de la prescription dès lors qu’un seul grief, apparent dès la souscription de l’offre, permettait aux emprunteurs d’exercer leur action dès cette date (CA Paris, 13 avr. 2018, n° 16/17084). La prescription quinquennale de l’article L. 110-4 du Code de commerce s’applique à l’action en déchéance et son régime se trouve désormais aligné sur celui de la nullité (Cass. 1 re civ., 1 er mars 2017, n° 16-10.142 : JurisData n° 2017-003315. – CA Paris, 19 déc. 2018, n° 16/25325). En application du principe selon lequel lorsque 2 prétentions successives ne tendent pas aux mêmes fins, la première n’a pas pour effet d’interrompre le délai de prescription de la seconde, les juridictions du fond ont jugé irrecevable car prescrite l’action tendant à la nullité formée à titre subsidiaire (TGI Paris, 12 déc. 2016, n° 15/01543). Les règles de prescription en matière de TEG erroné étant désormais connues avec précision, en présence de moyens sérieux d’irrecevabilité, le juge de la mise en état a le pouvoir de séquencer l’instance, pour permettre au tribunal de statuer, dans un premier temps, sur la prescription de l’action des emprunteurs puis, s’il n’est pas mis fin à l’instance, d’examiner les demandes et les autres moyens de défense des parties.

Le point de départ de la prescription peut-il être reporté à la faveur de la production d’une expertise amiable ou à raison de la qualité des emprunteurs ?

Les expertises amiables, si elles sont susceptibles d’éclairer le juge ( Cass. c h. mixte, 28 sept. 2012, n° 11-18.710 : JurisData n° 2012-022400. – Cass. 1 re civ., 6 avr. 2016, n° 15-12.495, inédit. Cass. 1 re civ., 30 nov. 2016, n° 15-23.182, inédit. – Cass. 1 re civ., 6 sept. 2017, n° 16-19.063 : JurisData n° 2017-019492 ), n’ont pas une valeur probante suffi sante lorsqu’elles sont fondées sur des données erronées, d’autant plus que la démarche consistant à faire vérifier par un tiers le calcul du TEG procède de la seule volonté de l’emprunteur (Cass. 2 e civ., 12 avr. 2018, n° 17- 17.603, inédit. – Cass. 1 re civ., 12 déc. 2018, n° 17-22.341 : JurisData n° 2018-022903. – CA Paris, 3 nov. 2017, n° 15/23307 : JurisData n° 2017-022496)…

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck