[Extrait Evaluation du Préjudice Corporel] LA RÉPARATION INTÉGRALE

Extrait du manuel Evaluation du Préjudice Corporel

Collection Droits & Professionnels

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CHAPITRE 1 LA RÉPARATION INTÉGRALE

Énoncé du principe. La réparation intégrale vise à rétablir l’équilibre détruit par le dommage et à replacer la victime dans une situation la plus proche possible de celle où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu. Il s’ensuit que la réparation doit être égale à l’intégralité du préjudice sans jamais pouvoir le dépasser. C’est ce que résume la formule «tout le, préjudice, rien que le préjudice».

Parfois proclamée comme une évidence, la réparation intégrale est en réalité un principe souvent débattu, spécialement en matière de dommage corporel où il est l’objet de vives controverses. Le praticien ne peut donc se dispenser, compte tenu des enjeux importants de la notion, d’en connaître la valeur (Section 1) et la portée (Section 2).

SECTION 1 VALEUR DU PRINCIPE DE RÉPARATION INTÉGRALE

Il importe ici de situer le principe de réparation intégrale sur l’échelle des normes (§ 1) et de discerner la spécificité du principe au regard de notions voisines (§ 2).

1. – Valeur normative

Le principe de réparation intégrale a, certes, été révélé par la jurisprudence, laquelle affirme, depuis un arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation en date du 28 octobre 1954, que « le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime, (…), dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu». Cependant, la valeur normative du principe de réparation intégrale demeure incertaine tant au niveau national qu’européen, fragilisant ainsi sa portée.

Au plan national, tout d’abord, il n’existe aucun texte proclamant ce principe. C’est la raison pour laquelle la jurisprudence le rattache, selon les cas, aux règles générales des articles 1240 (ancien article 1382), 1217 et 1231‑1 (ancien article 1147) du Code civil, mais a pu également l’élever au rang de principe autonome8. Le champ d’application du principe de réparation intégrale se retrouve, dès lors, limité au droit commun. En effet, le droit spécial, telle la législation des accidents du travail, y déroge souvent en n’ouvrant droit qu’à une réparation forfaitaire ou plafonnée. Or, tant que le principe de réparation intégrale ne sera pas clairement consacré par le Conseil constitutionnel, le législateur restera libre d’y déroger.

Pourtant, les occasions d’ériger cette règle en principe de valeur constitutionnelle n’ont pas manqué, puisque dans plusieurs décisions le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur le droit de réparation de la victime et sur la responsabilité. Quelques-unes de ces décisions ont d’ailleurs semé le doute au sein de la doctrine. Ainsi, pour certains auteurs, il n’est pas possible de savoir aujourd’hui si « aux yeux du Conseil constitutionnel, le principe de réparation intégrale revêt ou non une valeur constitutionnelle ». Pour d’autres, il était possible de « croire », en particulier avec la décision n° 82‑144 du 22 octobre 1982, à la reconnaissance d’un principe de réparation intégrale.

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L’évaluation du préjudice corporel

La référence des professionnels en droit du dommage corporel

AUTEUR(S) : Max Le Roy, Jacques-Denis Le Roy et Frédéric Bibal

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