EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE DU DROIT – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 11 – 15 MARS 2021
Me Jean-Yves Moyart, plus connu des internautes sous le nom de Me Mô, est décédé le 20 février à l’âge de 53 ans. Avocat blogueur lillois, habitué des cours d’assises et de la criminalité « ordinaire », il avait ce talent : raconter ces affaires lugubres d’où surgit l’humanité tout entière. De ces récits devenus célèbres à travers un blog éponyme, Me Mô avait tiré un livre, bien-nommé « Au guet-apens » (éd. La Table ronde) (Portrait paru in JCP G 2012, 36).

C’est la nuit tombée qu’il retrouve son clavier sous les traits virtuels de Me Mô. Car Jean-Yves Moyart, de son vrai nom, dort très peu. Une chance pour ce passionné d’assises qui conjugue ses longues journées de travail avec l’écriture de ce blog, né en mars 2008 de son envie d’écrire, et de celle d’expliquer son métier. Au fil des chroniques, versées sur l’écran d’un seul jet à partir de ses souvenirs, se déclinent des récits de vie souvent chaotiques, des instants d’audience émouvants, drôles ou cruels, des drames et des personnages, froids, émus, maladroits, à l’étroit dans leur costume d’accusé ou de victime. « Nous sommes très loin des raccourcis journalistiques », souligne le blogueur narrateur. « Dans 90 % des cas, notre métier c’est autre chose que ces entre-filets qui sortent dans la presse. Il s’agit d’accompagner, avec des mots, des expressions. Essayer de faire comprendre au client son procès, avancer vers une sorte d’apaisement général ». Il résume : « vous devez vous tenir aux côtés de votre client comme si vous défendiez votre petit frère ». Dans ce blog qu’il souhaite « pédagogique », Me Mô confie ses propres interrogations et ses angoisses de pénaliste souvent assis près du boxe. Celles du « nanti de la vie », bien éduqué, qui tente de prêter à l’homme ou à la femme qu’il défend des outils pour se livrer et percevoir la souffrance des victimes. « Je pense qu’à travers certaines nouvelles, le lecteur arrive à éprouver, un peu, la compassion qu’éprouve nécessairement l’avocat pour le client qu’il défend, ce qui n’est pas toujours évident ». L’avocat n’épargne pourtant pas le lecteur avec certains récits particulièrement éprouvants, comme « Noël » dans lequel un trio fait subir les pires tortures à un sans-abri. Mais il n’a de cesse de prouver la vertu de la justice pénale.
LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GENERALE
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