ECLAIRAGE. –  La profession notariale conjugue sécurité juridique et innovation technologique. Environ 60 % des offices signent aujourd’hui des actes authentiques électroniques. D’ici fin 2015, 2.000.000 d’actes authentiques électroniques seront archivés, soit 2.500 actes déposés chaque jour. Après Téléactes mis en place il y a dix ans, l’acte authentique électronique, issu d’un projet lancé en 2000 par le Conseil Supérieur du notariat (CSN), marque une étape fondamentale de l’avancée du notariat dans l’ère numérique. Il a été créé par décret en 2005 et la signature du premier acte dématérialisé a été célébrée en 2008.

Maître Marie-Hélène Kraft-Faugère, notaire à Cahors (Lot) et membre du Bureau du Conseil supérieur du notariat (CSN) en charge de la communication, souligne le succès de ce nouvel outil : « l’acte authentique électronique notarié est la preuve de la modernité de notre profession, première profession du droit à s’être dotée de cette technologie. Il fait l’unanimité de notre clientèle, sans distinction d’âge…concrétisant ainsi à leurs yeux l’avance technologique du notariat et sa modernité ».

En pratique – Le processus de signature d’un acte authentique sur support électronique est simple et efficace, tout en gardant sa solennité. Il permet de réduire significativement le temps consacré à la signature de l’acte et de ses annexes : « il n’est plus nécessaire de parapher des dizaines de pages pour conclure la transaction, deux signatures suffisent (la première pour l’acte et la seconde pour les annexes) » précise Maître Kraft-Faugère.

L’acte est préparé sur le logiciel habituel de rédaction d’actes, les annexes sont scannées et durant le rendez-vous la visualisation de l’acte authentique se fait sur « grand écran ». Après lecture de l’acte, et intégration des éventuelles modifications, le notaire le valide à l’aide de la clé REAL. Cette clé, qui ressemble à une clé USB, contient « les outils de signature », c’est-à-dire les données cryptées relatives à l’identification et à la signature du notaire. Chacune des parties appose ensuite sa signature sur une tablette à l’aide d’un stylet électronique, puis le notaire signe l’acte à l’aide de sa clé REAL.

Le réseau électronique sécurisé du notariat (réseau REAL) qui permet d’assurer la signature des actes authentiques électroniques est « en constante évolution pour assurer des débits et une qualité de service améliorés » souligne Maître Kraft-Faugère.

L’acte est alors automatiquement envoyé au MICEN (Minutier central électronique des notaires de France), serveur destiné à assurer la conservation centralisée des actes au niveau national. En effet, la conservation des actes est également totalement dématérialisée.

Pour les actes soumis aux formalités de publicité foncière, la transmission des données s’opère via le système Téléactes. 

Une sécurité garantie à tous les niveaux – L’acte authentique électronique répond à l’impératif de sécurité juridique, thème qui a été d’ailleurs au cœur des travaux du 111^ème Congrès des notaires de France (Strasbourg, 10-13 mai 2015). Tout en conservant les qualités de l’acte authentique – date certaine, force probante, force exécutoire – il « accroît la sécurité juridique de l’acte authentique à plusieurs titres » comme en témoigne Maître Kraft-Faugère : « Il réduit le risque d’erreur matérielle. En effet, il permet en cours de réception d’acte de modifier facilement le texte, sous le regard des parties, sans avoir besoin de faire un renvoi, lequel, s’il avait été oublié de le faire approuver par les parties, serait réputé non écrit. Il supprime également tout risque de destruction ou de disparition de l’acte authentique, grâce à la conservation centralisée des actes authentiques électroniques au MICEN … Afin d’assurer la sécurité et la conservation des actes authentiques électroniques, un cahier des charges très strict est respecté par l’Association pour le Développement du Service Notarial (ADSN). Cette association créée en 1983, contrôlée par le Conseil supérieur du notariat, est un véritable incubateur des projets de la profession notariale. Ainsi la sécurité des actes authentiques électroniques est garantie à tous les niveaux : accès exclusif pour le notaire rédacteur, signature certifiée et inviolable, contenu inaltérable, transferts ultra-sécurisés, audits, veilles permanentes … L’ADSN en charge du MICEN garantit une conservation parfaite des actes authentiques électroniques pendant 75 ans avant leur remise aux archives départementales concernées. Le reformatage régulier du MICEN prévu par la loi et l’adaptation du format des fichiers dans le temps permettent de suivre les mutations technologiques et assurent la pérennité des données. »

L’acte authentique électronique de demain – Le notariat continue sa rapide avancée dans le domaine technologique. Maître Kraft-Faugère livre quelques pistes d’évolutions à court terme :

• la possibilité prochaine « de signer les actes authentiques électroniques chez les clients » ;
• l’utilisation de la visioconférence : « en 2016, il sera possible de signer un acte authentique électronique avec deux notaires présents à deux endroits différents, chaque notaire ayant ses clients dans son bureau. Le déploiement de notre nouveau réseau REAL 3 permettra en effet l’utilisation de la visioconférence dans les offices et donc la signature des actes authentiques électroniques à distance » ;
• l’évolution de la clé REAL : « cette clé va se transformer dans la mesure où les certificats seront hébergés dans le cloud notarial, actuellement en cours d’élaboration, et la sécurité sera encore renforcée par une technique biométrique d’accès aux certificats»

Le déploiement de l’acte authentique électronique (les chiffres) – L’acte authentique électronique s’est significativement développé depuis sa création, comme en témoignent les éléments chiffrés fournis par Maître Kraft-Faugère : « De 995 offices utilisateurs à fin 2012, nous sommes passés à 2671 au 31 décembre 2014. Au 31 décembre 2015, 3500 offices offriront à leurs clients la signature dématérialisée sur tablette. Le 13 février 2015 le millionième acte a été archivé au MICEN et au 31 décembre 2015 nous devrions avoir 2.000.000 d’AAE archivés,  soit 2.500 AAE déposés chaque jour au MICEN. »

Propos recueillis pas Claire Richert auprès de Maître Marie-Hélène Kraft-Faugère, notaire à Cahors (Lot) et membre du Bureau du CSN en charge de la communication.