[L’ENQUÊTE] Les incubateurs des barreaux : une voix nouvelle parfois dissonante

EXTRAIT DE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 21 – 21 MAI 2018 – © LEXISNEXIS SA

LA SEMAINE DU DROIT L’ENQUÊTE

 

Les incubateurs des barreaux : une voix nouvelle parfois dissonante

Anaïs Coignac

 

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En un an, le mouvement s’est accéléré. Suivant l’initiative lancée par Paris en 2014, les barreaux de France créent tour à tour leur incubateur, structure autonome et rattachée à eux dans l’ensemble. Portés par le vent de l’innovation et les dernières réformes législatives, les incubateurs souhaitent accompagner les porteurs de projets dans la profession et susciter l’entreprenariat chez leurs confrères. Toutefois l’interprétation à géométrie variable des règles professionnelles sur le territoire créé autant d’espoirs que d’obstacles.

 

Définition des incubateurs. – Marché du droit, legaltech, plateformes juridiques, procédures dématérialisées et digitalisées, activité commerciale… Autant de mots tabous il y a encore à peine dix ans dans la profession d’avocat. Fruit d’initiatives individuelles ou marginales voire de concurrents appelés « braconniers du droit », c’est un mouvement, celui de l’innovation, que les instances ordinales ont décidé d’accompagner, contrôler ou favoriser selon les perspectives. Et pour ce faire, elles se sont notamment dotées d’incubateurs, à l’image des grandes écoles ou des réseaux de start-up en France. « C’est la réunion d’avocats ayant une vision moderne et progressiste du barreau, selon Louis Degos, président de la commission Prospective et Innovation du Conseil national des barreaux (CNB), ancien membre du conseil de l’Ordre de Paris. C’est à la fois une structure rattachée à un barreau et un espace de liberté, d’autonomie qui permet de développer des idées ». Pour Alexis Chabert, membre du conseil de l’Ordre, président de la commission Prospective du barreau de Lyon et coresponsable de l’incubateur affilié, « l’incubateur de Lyon c’est un catalyseur au sein du barreau. Il doit permettre de donner les moyens aux avocats qui ont les projets de les développer et faire savoir au plus grand nombre que l’innovation est au cœur de nos métiers, que nous avons su nous adapter, et enfin, cela doit susciter des vocations chez nos confrères ». Olivier Raynaud, quant à lui, membre du conseil de l’Ordre et de l’incubateur de Marseille, ajoute : « il appartient à un incubateur d’étudier les projets soumis en fonction d’un cahier des charges établi, voir s’il est conforme aux valeurs de la profession ». Enfin Bernard Lamon, avocat spécialiste en informatique et Internet, estime qu’« un incubateur sert à accompagner des projets innovants qui cassent les habitudes ».

Autant de perceptions qui s’épousent, se complètent mais parfois aussi se contredisent. Le rapport Haeri sur l’avenir de la profession d’avocat, notamment co-rédigé avec Bernard Lamon, et remis au précédent garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas en février 2017, témoigne de cette réalité (JCP G 2017, act. 196, Aperçu rapide F. G’sell ; RPPI 2017, entretien 1). La conclusion invite au changement « il est encore temps » titrent les rapporteurs. Et d’expliquer à quel point ils ont été surpris par « l’existence d’un décalage entre le potentiel de la profession et l’image qu’elle renvoie, entre son incroyable attractivité et son incapacité à se projeter dans l’avenir ». Ils précisent : « nous n’imaginions pas davantage à quel point ses membres souhaitent lui rester fidèle, malgré les déceptions et les inquiétudes. C’est peut-être d’ailleurs l’élément le plus marquant (et à certains égards préoccupant) de notre constat ». Dans ses préconisations, le rapport insiste sur l’importance de créer des incubateurs, des partenariats avec les acteurs du numérique, des observatoires de l’innovation au sein des Ordres.

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