Des réponses pratiques, synthétiques et opérationnelles pour tous les praticiens du droit social
Lexis® Pratique Social présente de manière concise et pratique toute la réglementation du droit du travail et de la protection sociale.
Destiné aux praticiens du droit social, il répond à leur besoin d’accéder rapidement à des informations claires, concrètes et précises.
Cet ouvrage est organisé selon un plan didactique couvrant près de 200 études. Chaque étude débute par une partie « synthèse » offrant au lecteur une vision « condensée » du sujet, accompagnée d’une alerte sur les dernières actualités commentées.
Les développements sont ponctués de différents blocs d’intention : « conseil pratique », « exemple », « remarque », « attention » destinés à attirer l’attention du lecteur sur certains points particuliers. Les commentaires sont également enrichis de nombreuses références aux sources (textes, circulaires, jurisprudence).
Pour un examen plus approfondi sur une question donnée, le lecteur peut se référer aux encyclopédies JurisClasseur LexisNexis et aux fiches pratiques (Lexis 360®) citées dans la rubrique « Pour aller plus loin » .
LexisNexis vous propose ci-dessous un extrait de l’ouvrage Lexis Pratique Social.
Rupture du contrat de travail
Modes de rupture
Licenciement pour motif personnel – Procédure
Sources
C. trav., art. L. 1232‑2 à L. 1232‑14, L. 1332‑2 à
L. 1332‑5
C. trav., art. R. 1232‑1 à D. 1232‑12
Circ. min. n° 91/16, 5 sept. 1991
Synthèse
1651 L’employeur qui souhaite rompre le contrat de travail pour une cause inhérente à la personne du salarié doit respecter la procédure légale de licenciement pour motif personnel. À défaut, le licenciement est irrégulier.
1652 Champ d’application de la procédure – La procédure de licenciement pour motif personnel régit le licenciement de tout salarié sous CDI, fondé sur une cause inhérente à sa personne. Toutefois, elle ne s’applique pas pendant la période d’essai.
Sont ainsi principalement visés les licenciements consécutifs à une faute (licenciement disciplinaire), des absences, une maladie prolongée ou une insuffisance professionnelle. Elle concerne aussi, sauf dérogation, les licenciements pour fin de chantier (C. trav., art. L. 1236‑8). Sur la définition du licenciement pour motif personnel et les différentes causes possibles, V. n° 1599.
Sur les règles spécifiques applicables à la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai, V. n° 571.
La procédure de licenciement disciplinaire s’applique également en cas de rupture anticipée d’un CDD pour faute grave ou lourde du salarié, aucune formalité n’étant toutefois imposée pour la convocation à l’entretien préalable (V. n° 865).
Des dispositions protectrices contre le licenciement s’appliquent toutefois aux femmes enceintes (avant et pendant le congé de maternité) et aux jeunes mères (pendant et après ce congé) (V. n° 6261), ainsi qu’à tout salarié pendant les 4 semaines suivant la naissance de son enfant.
1653 Procédure impérative – L’employeur qui entend se séparer d’un salarié doit mettre en oeuvre la procédure de licenciement et la suivre à la lettre (Cass. soc., 20 avr. 2005, n° 02‑46.290). À défaut, la procédure est irrégulière et il encourt des sanctions ; le non-respect de certaines règles de procédure peut même avoir pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Sur les sanctions applicables en cas d’irrégularité du licenciement, V. n° 8084.
1654 Étapes de la procédure – La procédure de licenciement pour motif personnel comporte deux étapes :
− une phase de conciliation, l’entretien préalable ;
− puis la notification du licenciement.
Les formalités à accomplir sont identiques quelles que soient la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié.
Lorsque le licenciement concerne un salarié protégé (représentant du personnel notamment), l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail est nécessaire (V. n° 3405).
1655 Entretien préalable – L’employeur est tenu de convoquer le salarié dont le licenciement est envisagé à un entretien préalable, qui doit lui permettre d’indiquer au salarié les motifs de la décision qu’il envisage de prendre et de recueillir ses explications (V. n° 1659 et s.).
Seule la convocation du salarié à l’entretien préalable s’impose à l’employeur ; dès lors qu’elle ne lui est pas imputable, l’absence d’entretien n’empêche pas la poursuite de la procédure et ne rend pas le licenciement irrégulier.
La lettre de convocation doit nécessairement préciser l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien ainsi que la possibilité pour le salarié de se faire assister par un membre du personnel ou, s’il n’existe pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise, par un « conseiller du salarié ».
L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée de convocation ou sa remise en mains propres au salarié.
En cas de licenciement disciplinaire, l’entretien préalable peut être précédé d’une mise à pied conservatoire (V. n° 1663 et 2544).
1656 Notification du licenciement – Si, à la suite de l’entretien préalable, l’employeur choisit de licencier, le licenciement doit être notifié par écrit au salarié, en principe par lettre recommandée avec accusé de réception (V. n° 1677 et s.).
La lettre de licenciement doit émaner de l’employeur ou de son représentant ayant reçu délégation permanente pour embaucher et licencier ; elle ne peut être signée par une personne extérieure à l’entreprise.
Elle doit nécessairement indiquer le ou les motifs de la décision de l’employeur ; à défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Elle ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date à laquelle le salarié a été convoqué à l’entretien préalable et, en cas de licenciement disciplinaire, plus d’un mois après cette date.
1657 Incidences d’une procédure conventionnelle – Outre la procédure légale, la procédure conventionnelle prévue doit également, le cas échéant, être respectée (V. n° 1688 et s.).
Il s’agit, le plus souvent, de l’obligation de consulter, avant le prononcé de tout licenciement, un conseil de discipline ou une commission paritaire (notamment en cas de licenciement disciplinaire).
1658 Date de la rupture du contrat – C’est le jour de l’envoi de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception (ou de la présentation de la lettre remise en mains propres) notifiant le licenciement qui marque la date de la rupture des relations de travail (V. n° 1687).
I. Entretien préalable
1659 Avant toute décision, l’employeur doit convoquer le salarié dont le licenciement est envisagé à un entretien préalable.
Ni une conversation téléphonique ni un entretien informel ne sauraient remplacer cette formalité, qui doit être respectée :
− indépendamment de toute procédure conventionnelle éventuellement prévue (V. n° 1688 et s.) ;
− même en cas de faute grave ou lourde du salarié ;
− quel que soit l’état de santé ou de disponibilité du salarié (Cass. soc., 25 nov. 1992, n° 89‑42.186 : JurisData n° 1992‑003236).
Remarque Cette obligation se limite à convoquer le salarié à un entretien, et non à ce que cet entretien ait effectivement lieu : dès lors qu’elle n’est pas imputable à l’employeur, l’absence d’entretien n’atteint ni le cours de la procédure, ni la légitimité du licenciement ; il ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 11 sept. 2012, n° 11‑20.371).
1° Convocation à l’entretien
a) Forme de la convocation
1660 Convocation écrite – Le salarié doit être convoqué à l’entretien préalable par écrit, par lettre recommandée ou par lettre remise en mains propres contre décharge.
La lettre recommandée est expédiée à l’adresse personnelle connue du salarié. Si elle revient avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée » ou « adresse incomplète », dès lors que cette adresse était bien celle donnée par le salarié, ou si le salarié la refuse, la convocation reste considérée comme régulière (Cass. soc., 23 juill. 1980 : Bull. civ. V, n° 695. – Cass. soc., 13 sept. 2006, n° 04‑45.698 : JurisData n° 2006‑03920).
L’envoi de la convocation par télécopie n’est pas admis (Cass. soc., 21 mars 2005, n° 04‑45.698). En revanche, l’utilisation du système de courrier rapide dit « chronopost » a été jugé valable parce que permettant de justifier les dates d’expédition et de réception de la lettre (Cass. soc., 8 fevr. 2011, n° 09‑40.027 : JurisData n° 2011‑001298).
Conseil pratique Bien que la loi ne l’impose pas, il est conseillé, pour des raisons de preuve, de choisir la lettre recommandée
avec avis de réception.
L’employeur peut également utiliser l’exploit d’huissier (Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09‑71.472).
1661 Convocation personnelle – La convocation est nécessairement individuelle.
Il est ainsi exclu de convoquer par une seule et même lettre plusieurs salariés ayant commis la même faute (Cass. soc., 23 avr. 2003, n° 01‑40.817. – V. n° 1676).
De même, l’employeur qui licencie un couple de gardiens doit engager deux procédures distinctes, donc adresser deux convocations à l’entretien préalable (Cass. soc., 10 mai 2001, n° 99‑42.555 : JurisData n° 2001‑009617).
b) Contenu de la convocation
1662 La lettre de convocation doit mentionner :
− l’objet de l’entretien : il doit être précisé sans équivoque qu’il s’agit bien d’un entretien préalable à un éventuel licenciement, sans pour autant que soit indiqué, à ce stade, le motif de licenciement envisagé (Cass. soc., 13 mai 2009, n° 08‑40.103), sauf dispositions conventionnelles l’imposant (Cass. soc., 9 janv. 2013, n° 11‑25.846 : JurisData n° 2013‑000026. – V. n° 1688 et s.) ;
− la date, l’heure et le lieu de l’entretien ;
L’employeur peut librement les choisir, mais le jour retenu doit normalement être un jour ouvré et l’heure se situer pendant l’horaire de travail (Cass. soc., 9 avr. 1992, n° 91‑41.169) ; quant au lieu, c’est en principe le lieu où s’exerce le travail, éventuellement le siège social de l’entreprise (Cass. soc., 24 janv. 1996, n° 92‑45.287). Il a également été jugé que l’employeur peut convoquer un salarié en congé payé pour une date fixée postérieurement à son retour dans l’entreprise (Cass. soc., 23 mars 2004, n° 01‑45.225).
− la possibilité pour le salarié de se faire assister par un membre du personnel ou, s’il n’existe pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise, par un « conseiller du salarié », inscrit sur une liste spéciale établie par le préfet et tenue à la disposition des salariés dans chaque section d’inspection du travail et dans chaque mairie ; mention doit être faite de l’adresse de ces deux services (Cass. soc., 19 sept. 2007, n° 05‑45.605).
Attention L’absence de l’une de ces mentions entache la procédure d’irrégularité et cause nécessairement au salarié un préjudice que l’employeur doit réparer (Cass. soc., 13 mai 2009, n° 07‑44.245 : JurisData n° 2009‑048172). En outre, le défaut d’indication de la possibilité de se faire assister est sanctionné par le versement au salarié d’une indemnité au plus égale à un moins de salaire (et cela même si, au final, il aura pu se faire assister lors de l’entretien) (V. n° 8084). Indiquer au salarié qu’il a la possibilité de se faire assister par un conseiller du salarié alors que des représentants du personnel existent dans l’entreprise constitue aussi une irrégularité de procédure (Cass. soc., 19 nov. 2008, n° 07‑43.191).
c) Délai de convocation
1663 Aucun entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée de convocation ou sa remise en mains propres au salarié.
Le salarié doit disposer d’un délai de 5 jours pleins (Cass. soc., 3 juin 2015, n° 14‑12.245).
Le jour de présentation ou de remise de la lettre ne compte pas ; le décompte se fait à partir du lendemain seulement (Cass. soc., 20 févr. 2008, n° 06‑40.949 : JurisData n° 2008‑042840).
Les dimanches et jours fériés, non ouvrables, sont également à exclure.
Ainsi l’entretien ne peut-il en pratique intervenir que le 6e jour ouvrable ; et si le délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié, il est prolongé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Cass. soc., 9 juin 1999, n° 97‑41.349).
Ce délai est impératif. Il a été jugé d’ordre public. Le salarié ne peut y renoncer (Cass. soc., 28 juin 2005, n° 02‑47.128).
Attention En cas de licenciement disciplinaire, la convocation à l’entretien préalable ne peut être adressée plus de 2 mois après que l’employeur ait eu connaissance de la faute du salarié, sauf si ce fait fautif a donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Par ailleurs, lorsque l’employeur envisage de licencier un salarié pour faute grave, il peut prononcer à son encontre une mise à pied conservatoire afin d’éviter que sa présence dans l’entreprise pendant le déroulement de la procédure de licenciement ne perturbe la bonne marche du service (Cass. soc., 4 avr. 1979 : Bull. civ. V, n° 313. – V. n° 2544). La mise à pied et la convocation à l’entretien préalable au licenciement doivent alors être concomitantes (Cass. soc., 30 sept. 2004, n° 02‑43.638 : JurisData n° 2004‑024978) ou n’être séparées que par un bref délai (Cass. soc., 16 juin 2004, n° 02‑42.663). Si la notification de cette mise à pied n’obéit à aucun formalisme particulier, la mesure est souvent inscrite, en pratique, dans la convocation à l’entretien préalable.
2° Participants à l’entretien
a) Employeur
1664 C’est en principe l’employeur lui-même qui dirige l’entretien. Mais il est admis qu’il puisse se faire représenter, y compris par une personne non délégataire du pouvoir de licencier (Cass. soc., 14 juin 1994, n° 92‑45.072).
En pratique, c’est le plus souvent le directeur ou le responsable des ressources humaines qui mène l’entretien.
En toute hypothèse, il doit s’agir d’une personne appartenant à l’entreprise (Cass. soc., 26 mars 2002, n° 00‑40.430).
L’employeur ne peut donc pas mandater, par exemple, un cabinet d’expertise comptable extérieur pour conduire le licenciement (Cass. soc., 7 déc. 2011, n° 10‑30.222 : JurisData n° 2011‑027343).
En revanche, le directeur du personnel engagé par une société mère pour exercer des fonctions à la fois au sein de la société et de ses filiales en France n’est pas une personne étrangère : il peut procéder à l’entretien préalable (et au licenciement qui s’ensuivra) (Cass. soc., 15 déc. 2011, n° 10‑21.926 : JurisData n° 2005‑026525) ; la même faculté est offerte au président d’un groupe.
1665 Assistance de l’employeur – Il est également admis, bien que la loi ne le prévoie pas expressément comme elle le fait pour le salarié (V. n° 1662 et 1666), que l’employeur puisse se faire assister durant l’entretien mais à deux conditions :
− que la personne choisie appartienne à l’entreprise (il s’agira le plus souvent du supérieur hiérarchique du salarié) ;
Un tiers extérieur, avocat par exemple, ne saurait en aucun cas intervenir (Cass. soc., 26 mars 2002, n° 99‑43.155).
− que sa présence ne porte pas atteinte aux intérêts du salarié, ne nuise pas au dialogue, ne transforme pas l’entretien en enquête, le détournant ainsi de son objet (Cass. soc., 17 sept. 2008, n° 06‑42.195).
Quatre personnes autour de l’employeur, par exemple, c’est beaucoup trop (Cass. soc., 11 févr. 2009, n° 07‑48.056).
b) Salarié
1666 Sauf cas exceptionnels d’indisponibilité (V. n° 1673), le salarié doit en principe se présenter personnellement à l’entretien, mais il peut se faire assister :
− par toute personne appartenant au personnel de l’entreprise ;
− ou, en l’absence d’institutions représentatives du personnel, par un conseiller du salarié, étranger à l’entreprise et inscrit sur une liste établie, au plan départemental, par le préfet dont on lui aura donné la liste en même temps que la convocation à l’entretien préalable (V. n° 1662).
Cette liste reste également à sa disposition dans chaque section d’inspection du travail et dans chaque mairie ; elle est aussi, en pratique, consultable sur le site internet de la DIRECCTE.
L’absence de représentation du personnel s’apprécie dans le cadre de l’entreprise et non de l’établissement, ou éventuellement au niveau de l’unité économique et sociale (UES) si l’entreprise est dépourvue de représentants du personnel (Cass. soc., 21 sept. 2005, n° 03‑44.810).
Remarque Se faire assister est un droit pour le salarié, en aucun cas une obligation.
1) Assistance par un salarié de l’entreprise
1667 Choix de l’assistant – La personne choisie par le salarié au sein de l’entreprise pour l’assister n’est pas nécessairement un représentant du personnel, bien que cela soit souvent le cas en pratique. Cette personne peut également appartenir à un autre service ou à un autre établissement que le salarié convoqué (Cass. soc., 17 déc. 1997, n° 95‑40.816).
Le salarié est libre choisir la personne qui l’assistera : l’employeur ne peut pas limiter son choix à certaines personnes (CE, 16 juin 1995, n° 145728) ou lui imposer ses propres choix (Cass. soc., 31 oct. 2006, n° 04‑47.856).
Remarque L’entretien préalable ayant un caractère strictement individuel (V. n° 1676), il est exclu que le salarié soit entendu
en présence de collègues, une telle présence ne pouvant être assimilée à une assistance du salarié (Cass. soc., 20 juin 2007,
n° 06‑41.823 : JurisData n° 2007‑039721).
1668 Conséquences – L’assistant ne doit subir aucune perte de salaire du fait de son intervention ; son salaire est maintenu et il est, le cas échéant, remboursé des frais exposés (déplacement, repas) (Cass. soc., 3 mars 2004, n° 01‑43.579 : JurisData n° 2004‑022691).
Si l’assistant est un représentant du personnel, le temps passé peut être imputé sur le crédit d’heures (Rép. min., JOAN 26 août 1985, p. 4037. – V. n° 2781 et 2852).
Remarque L’employeur n’est jamais tenu de convoquer l’assistant. C’est au salarié qu’il appartient de le faire.
2) Assistance par un conseiller du salarié
1669 Choix du conseiller – Le choix du « conseiller du salarié », quand il est fait appel à lui, est tout aussi large. Il doit simplement figurer sur la liste départementale mentionnée dans la lettre de convocation à l’entretien (V. n° 1662), et être en mesure, au jour voulu, de justifier de sa qualité auprès de l’employeur (Cass. soc., 25 sept. 2012, n° 11‑10.684).
La liste des conseillers comporte notamment le nom, l’adresse, la profession ainsi que l’appartenance syndicale éventuelle des conseillers.
Toute personne bénéficiant d’une expérience du monde de l’entreprise et des relations entre employeurs et salariés, ainsi que d’une certaine connaissance du droit social, peut en effet devenir conseiller du salarié, à l’exception des conseillers prud’homaux en activité.
Il appartient au salarié de prendre les contacts nécessaires, de communiquer au conseiller qu’il a choisi la date, l’heure et le lieu de l’entretien, et d’informer l’employeur de sa démarche.
1670 Statut du conseiller – Le conseiller du salarié est doté d’un véritable statut (C. trav., art. L. 1232‑7 à L. 1232‑14. – C. trav., art. D. 1232‑4 à D. 1232‑12).
Lorsqu’il est lui-même salarié, il bénéficie :
− d’un crédit d’heures de 15 heures par mois dans les entreprises d’au moins 11 salariés (aucun report d’un mois à l’autre n’étant possible) ;
Cette autorisation d’absence est strictement limitée au cadre de l’entretien (durée de l’entretien, temps de trajet pour s’y rendre et en revenir) ; dans les entreprises d’au moins 11 salariés, l’employeur ne peut pas refuser au salarié qui a la qualité de conseiller du salarié le droit de s’absenter pour exercer sa mission.
Ces heures d’absence sont considérées et payées comme temps de travail par l’employeur, qui est remboursé par l’État des salaires maintenus ainsi que des avantages et des charges sociales correspondants (sur les justificatifs à fournir, V. n° 1694. La charge des éventuelles majorations pour heures supplémentaires est répartie entre l’État et l’employeur proportionnellement au temps passé par le conseiller du salarié au sein de son entreprise et dans l’exercice de sa fonction d’assistance.
− de l’assimilation du temps passé hors de l’entreprise pendant les heures de travail pour l’exercice de sa mission à une durée de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d’assurances sociales et aux prestations familiales ainsi qu’au regard de tous les droits qu’il tient du fait de son ancienneté dans l’entreprise ;
− d’un accès à la formation dans le cadre d’un congé de formation économique, sociale et syndicale (V. n° 4192) ;
− d’une protection contre le licenciement, à condition d’avoir informé son employeur de sa qualité de conseiller (Cass. soc., 29 mars 2013, n° 11‑28.260. – V. n° 3405).
L’exercice de la mission de conseiller du salarié ne peut être une cause de rupture du contrat de travail et son licenciement ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail.
La protection du conseiller du salarié court à compter du jour où la liste est arrêtée dans le département par le préfet, indépendamment des formalités de publicité (Cass. soc., 22 sept. 2010, n° 09‑41.173), et se poursuit dans les 12 mois qui suivent la cessation des fonctions de conseiller du salarié, dès lors qu’elles ont été exercées pendant au moins un an (Cass. soc., 27 janv. 2010, n° 08‑44.376).
Par ailleurs, tous les conseillers du salarié ont droit :
− à une attestation individuelle de conseiller du salarié délivrée par la DIRECCTE, qui leur adresse également copie de l’arrêté préfectoral, afin de justifier de leur qualité auprès de l’employeur du salarié assisté ;
− au remboursement de leurs frais de déplacement (et des frais de repas dans certains cas) ;
− à une indemnité forfaitaire annuelle de 40 €, dès lors qu’ils ont effectué au moins 4 interventions au cours de l’année civile ;
− à une protection sociale en cas d’accident de trajet survenu à l’occasion de l’exercice de leur mission.
1671 Mission du conseiller – Il s’agit d’une mission d’aide et de conseil. Il peut intervenir dans la discussion, demander des explications à l’employeur, compléter celles du salarié, présenter des observations. Mais son rôle s’arrête là.
En effet, le conseiller du salarié n’est investi d’aucun pouvoir à l’encontre de l’employeur (Cons. const., 25 juill. 1989, déc. n° 89‑258 DC) ; il ne peut notamment imposer la communication d’aucun document de la part de l’employeur, ni obtenir aucun renseignement sur l’entreprise auprès de l’inspection du travail (Circ. min. n° 91‑16, 5 sept. 1991).
Il ne lui appartient pas non plus d’informer l’inspection du travail de situations non conformes à la réglementation du travail dont il aurait pu avoir connaissance à l’occasion de sa mission dans l’entreprise. Il est en effet tenu au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication et à une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur.
Un conseiller du salarié peut cependant valablement apporter son témoignage sur le contenu et le déroulement de l’entretien en cas de litige sur des faits non couverts par le secret professionnel (Cass. soc., 27 mars 2001, n° 98‑44.666 : JurisData n° 2001‑008921 – Circ. min. n° 91‑16, 5 sept. 1991).
3) Absence ou indisponibilité du salarié
1672 Absence volontaire – Il arrive que le salarié choisisse de ne pas se rendre à l’entretien préalable.
L’entretien préalable étant une formalité prévue dans son seul intérêt, son absence ne saurait lui être reprochée, elle ne constitue pas une faute, ni une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. soc., 28 nov. 2001, n° 99‑46.031. – Cass. soc., 11 sept. 2012, n° 13‑20.371).
L’absence d’entretien n’entrave pas le cours de la procédure : elle n’empêche pas l’employeur de passer à la phase suivante, celle de la notification du licenciement (Cass. soc., 28 nov. 2000, n° 98‑44.254. – V. n° 1677 et s.).
Elle n’est pas non plus un aveu de culpabilité : elle ne préjuge pas de la légitimité du licenciement (Cass. soc., 28 nov. 2000, n° 98‑44.254).
1673 Indisponibilité – Les conséquences sont les mêmes en cas d’absence non délibérée, due par exemple à l’état de santé du salarié : le fait que le salarié n’ait pu se rendre à l’entretien préalable pour cause de maladie n’est pas un obstacle à la poursuite de la procédure et ne rend pas le licenciement irrégulier (Cass. soc., 25 nov. 1992 : JurisData n° 1992‑003236), à moins que l’intention dolosive de l’employeur ne soit caractérisée (Cass. soc., 26 mai 2004, n° 02‑40.681).
L’employeur n’est jamais tenu de reporter l’entretien (Cass. soc., 26 mai 2004, n° 02‑40.681), sauf disposition conventionnelle l’y obligeant.
Il n’est donc pas tenu de proposer une autre date, même à la demande du salarié (Cass. soc., 26 mai 2004, préc.) ou s’il sait que le salarié ne pourra pas se déplacer. Il peut en revanche choisir de le faire (Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04‑43.819. – V. n° 1674).
En pratique, il appartient toutefois à l’employeur, en pareille hypothèse, de faciliter l’information et la défense du salarié malade :
− en fixant l’heure de l’entretien aux heures de sortie fixées par la sécurité sociale quand le salarié malade peut se déplacer ;
− en fixant l’entretien de telle sorte que le salarié puisse éventuellement s’y faire représenter, ou encore en l’invitant à formuler des observations par écrit et en lui laissant quelques jours pour le faire.
Un comportement négatif à ce titre a pu être jugé comme un manquement à la procédure (Cass. soc., 1er févr. 2001, n° 98‑45.784).
1674 Au cas d’entretien reporté sur demande du salarié, une autre convocation doit logiquement lui être adressée. Toutefois, l’absence d’une nouvelle convocation ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 3 févr. 2004, n° 01‑46.318 : JurisData n° 2004‑022228).
Il est par ailleurs admis que cette nouvelle convocation soit adressée par télécopie, dès lors que l’employeur la transmet dans un délai « raisonnable » (Cass. soc., 24 nov. 2007, n° 05‑44.098).
3° Déroulement de l’entretien
1675 Objet – L’entretien doit permettre à l’employeur :
− d’indiquer au salarié les motifs de la décision qu’il envisage de prendre ;
− et de recueillir les explications du salarié.
L’employeur ne saurait donc se rendre à l’entretien simplement pour signifier une mesure déjà définitivement arrêtée. Il doit prendre le temps de la discussion, sans être tenu, à ce stade de la procédure, de communiquer au salarié les pièces susceptibles de justifier la sanction (Cass. soc., 5 avr. 2004, n° 01‑47.153).
L’employeur doit aussi prendre le temps de la réflexion. L’entretien, qui vise à favoriser la conciliation, ne doit pas déboucher sur une décision immédiate : la procédure est viciée lorsque l’employeur fait part au salarié dès la fin de l’entretien de sa décision définitive, même si la lettre de licenciement lui est bien adressée à l’issue du délai légal (Cass. soc., 11 juill. 2007, n° 06‑40.225).
Conseil pratique Bien que les dispositions légales ne prévoient pas la rédaction d’un procès-verbal de l’entretien préalable, il est conseillé aux parties de rédiger et de signer un compte rendu, qui peut s’avérer utile en cas de contentieux.
L’Administration estime en effet que, signé des deux parties, un tel compte rendu doit pouvoir être produit devant un juge et constitue un élément de preuve (Circ. min., 5 sept. 1991).
On doit également admettre qu’un enregistrement puisse être réalisé si les deux parties le souhaitent. Mais à défaut d’accord, il n’a aucune force probante (Cass. soc., 20 nov. 1991 : Bull. civ. V, n° 519).
1676 Caractère personnel – L’entretien doit toujours rester strictement personnel. Il ne peut être groupé avec celui d’autres salariés, quand bien même les faits reprochés seraient identiques (Cass. soc., 24 avr. 2003, n° 01‑4.817).
II. Notification du licenciement
1677 Si, à la suite de l’entretien avec le salarié, l’employeur choisit de le licencier, il doit l’en informer officiellement : un licenciement ne devient effectif que par sa notification au salarié (Cass. soc., 9 janv. 2001, n° 98‑44.947). À défaut de notification, le licenciement est irrégulier ; il peut s’en trouver privé de cause réelle et sérieuse.
Remarque L’employeur peut donc toujours renoncer à poursuivre une procédure de rupture tant que cette notification n’a pas été faite, en mettant par exemple le salarié à la retraite (Cass. soc., 16 janv. 2008, n° 06‑44.583 : JurisData n° 2008‑042321) ou en abandonnant la procédure disciplinaire pour se placer sur le terrain du licenciement non disciplinaire (pour insuffisance professionnelle, par exemple).
En revanche, une fois notifié, le licenciement est irréversible ; l’employeur ne peut plus revenir sur sa décision qu’avec l’accord du salarié (Cass. soc., 3 oct. 2001, n° 99‑42.281. – Cass. soc., 4 mars 2015, n° 13‑16.148). Il est toutefois possible de revenir sur un licenciement par une rupture conventionnelle (Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13‑20.544) (V. n° 1687).
1° Conditions de forme
1678 Notification écrite – Le licenciement doit être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Elle doit être adressée au salarié lui-même, à son dernier domicile connu, et non à un tiers (même un avocat : Cass. soc., 30 nov. 1994, n° 93‑42.184).
Il s’agit toutefois d’un simple moyen de preuve destiné à prévenir toute contestation sur la date du licenciement.
Une lettre non recommandée (Cass. soc., 7 juill. 2010, n° 08‑45.139) ou une remise en mains propres contre décharge (Cass. soc., 16 juin 2009, n° 08‑40.722. – Cass. soc., 23 oct. 2013, n° 12‑12.700) sont en effet admises. La preuve de la réception peut même être apportée par simple témoignage (Cass. soc., 29 sept. 2014, n° 12‑20.217). Ce qui importe, c’est que le licenciement soit notifié par écrit.
Un licenciement seulement verbal est irrégulier et sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 10 avr. 2008, n° 06‑46.181). Malgré cette irrégularité, il a toutefois pour effet de rompre le contrat de travail (Cass. soc., 12 mars 1992, n° 90‑44.174) et suffit à faire courir le délai de préavis.
Important Un licenciement ne peut en aucun cas être implicite ; l’employeur doit manifester sa volonté de mettre fin au contrat de travail (Cass. soc., 3 juill. 2013, n° 12‑16.354).
1679 Signataire de la lettre – La lettre de licenciement doit émaner de l’employeur ou de son représentant ayant reçu délégation permanente pour embaucher et licencier (Cass. soc., 6 juill. 2004, n° 02‑43.322 : JurisData n° 2004‑024829).
Aucune disposition légale n’exige que cette délégation ait été donnée par écrit (Cass. soc., 6 juill. 2004, n° 09‑40.114).
Ce qui importe, c’est que le signataire de la lettre ait qualité pour agir (Cass. soc., 13 sept. 2005, n° 02‑47.619).
Le plus souvent, il s’agira du DRH en poste dans l’entreprise, mais il pourra s’agir tout autant :
− d’un gérant de succursale (Cass. soc., 27 mars 2013, n° 11‑27.641) ;
− du président d’une association, sauf dispositions contraires de ses statuts (Cass. soc., 10 juill. 2013, n° 12‑13.985. – Cass. soc., 7 mars 2015, n° 13‑20.452) ;
− du directeur salarié d’un comité d’entreprise auquel a été reconnu le pouvoir de représenter l’employeur dans toutes les actions liées à la gestion des ressources humaines, ce qui emporte le pouvoir de licencier au nom de ce dernier (Cass. soc., 29 sept. 2010, n° 09‑42.296 : JurisData n° 2010‑017050) ;
− ou encore, du directeur général d’une société par actions simplifiées (SAS) (Cass. soc., 26 janv. 2011, n° 10‑11.872).
La procédure a été jugée régulière lorsque la lettre est signée « pour ordre » au nom du DRH (Cass. soc., 10 nov. 2009, n° 08‑41.079 : JurisData n° 20009‑050257).
Quel qu’en soit l’auteur, la signature doit être manuscrite. Une signature numérisée constitue une irrégularité de procédure mais ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 17 mai 2006, n° 04‑46.706 : JurisData n° 2006‑034953).
Le licenciement est en revanche dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que la lettre le notifiant a été signée par une personne étrangère à l’entreprise (Cass. soc., 26 avr. 2006, n° 04‑42.860) ; l’employeur ne peut lui en donner mandat.
Il a également été jugé que la lettre signée par l’employeur mais remise au salarié par un tiers constitue une irrégularité de procédure (Cass. soc., 23 oct. 2013, n° 12‑12.700).
2° Contenu de la lettre
a) Énonciation du motif
1680 La lettre de licenciement doit nécessairement indiquer le ou les motifs de la décision de l’employeur. À défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. ass. plén. 27 nov. 1998, n° 96‑44.358 : JurisData n° 1998‑004650) ; le salarié peut en outre revendiquer l’octroi de dommages-intérêts (Cass. soc., 2 juin 2010, n° 09‑41.409).
L’obligation joue :
− même en cas d’aveu par le salarié, avant l’envoi de la lettre, des fautes ayant motivé la rupture (Cass. soc., 19 mars 1998, n° 96‑40.391) ;
− même si le salarié lui-même aurait souhaité que la raison de la rupture de son contrat de travail ne soit pas mentionnée (Cass. soc., 17 janv. 2008, n° 04‑40.740) ;
− même si le salarié a déjà pu avoir, d’une manière ou d’une autre, connaissance de ce qu’on lui reproche : cette connaissance ne peut suppléer le défaut d’énonciation des motifs dans la lettre de licenciement (Cass. soc., 1er févr. 2001, n° 99‑40.469).
1681 L’indication du motif doit être explicite : la simple référence aux motifs éventuellement contenus dans la convocation à l’entretien préalable ou une autre lettre ne répond pas à l’exigence légale (Cass. ass. plén., 27 nov. 1998, préc.).
Elle doit également être suffisamment précise : l’énoncé d’un motif imprécis équivaut à une absence de motif (Cass. soc., 17 janv. 2008, n° 04‑40.740).
Le fait qu’un des motifs énoncés dans la lettre de licenciement n’ait pas été évoqué par l’employeur lors de l’entretien préalable constitue une simple irrégularité de forme dont le salarié peut éventuellement demander réparation, mais qui ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 17 déc. 2014, n° 13‑20.217).
Attention L’exigence de motivation précise s’applique même lorsque le licenciement fait suite au refus d’une modification du contrat de travail : l’employeur ne peut se contenter d’invoquer ce seul refus et doit faire apparaître le motif de la modification (Cass. soc., 23 mai 2000, n° 97‑42.944).
Un grief est considéré comme précis dès lors qu’il est « matériellement vérifiable » (Cass. soc., 14 mai 1996, n° 99‑45.499).
A par exemple été jugée non suffisamment motivée, parce que trop brève ou trop évasive, une lettre :
− visant une « insuffisance de résultats », aucunement étayée (Cass. soc., 23 févr. 2000, n° 98‑40.482 : JurisData n° 2000, n° 000795), faisant simplement référence à une « discussion » (Cass. soc., 31 mars 1999, n° 96‑40.488) ou à un « comportement perturbateur » (Cass. soc., 7 nov. 2006, n° 05‑41.733) ;
− comportant des formulations telles que « les problèmes que vous occasionnez » ou « votre inadaptation au poste » (Cass. soc., 1er mars 2000, n° 97‑45.591), ou encore « votre travail ne donne pas satisfaction » (Cass. soc., 23 mai 2000, n° 98‑40.635).
Jugé en revanche suffisant, parce que constituant, dans ces cas d’espèce, un motif matériellement vérifiable :
− un comportement improductif, une incapacité à effectuer certaines tâches que la lettre énumérait, le refus d’accomplir d’autres opérations et le manque de rigueur dans l’exécution de travaux administratifs à l’appui d’un motif d’insuffisance professionnelle (Cass. soc., 29 mai 2002, n° 00‑43.506) ;
− des absences prolongées et répétées d’un salarié malade ayant rendu nécessaire son remplacement, de manière démontrée (Cass. soc., 14 févr. 2007, n° 05‑44.682).
Remarque Il n’est pas obligatoire pour autant que les faits soient datés, dès lors qu’ils peuvent être objectivement contrôlés
(Cass. soc., 5 janv. 1995, n° 96‑46.010. – Cass. soc., 11 juill. 2012, n° 10‑28.798 : JurisData n° 2012‑015962).
1682 Pluralité de griefs – L’employeur peut invoquer, dans la lettre de licenciement, plusieurs motifs de rupture inhérents à la personne du salarié, dès lors qu’ils procèdent de faits distincts (Cass. soc., 25 sept. 2007, n° 06‑40.640 : JurisData n° 2007‑040594) ; il doit alors strictement respecter les procédures applicables à chaque cause de licenciement.
Ainsi, par exemple, l’employeur qui invoque à la fois une faute grave et l’inaptitude du salarié doit respecter les règles propres au licenciement disciplinaire : ne pas attendre plus de 2 mois pour prendre sa décision, sous peine de prescription de la faute, et notifier le licenciement dans un délai d’un mois suivant l’entretien. Mais rien ne l’empêche, si les faits fautifs sont prescrits, de se limiter alors à invoquer l’autre motif avancé (Cass. soc., 17 mai 2008, n° 04‑46.706 : JurisData n° 2006‑034953).
En revanche, il est impossible de faire coexister dans une lettre de licenciement une cause économique et une cause personnelle (Cass. soc., 24 avr. 1990, n° 88‑43.555) ; l’employeur doit choisir d’y faire figurer le motif premier et déterminant de la rupture (Cass. soc., 3 avr. 2002, n° 00‑42.583).
b) Portée de l’énonciation des motifs
1683 La lettre de licenciement énonçant les motifs de rupture fixe les termes du litige (Cass. soc., 4 juill. 2012, n° 11‑17.469).
Ainsi, en cas de contestation :
− l’employeur est lié par les motifs qu’il a indiqués ; il lui est impossible d’invoquer des motifs différents (Cass. soc., 21 oct. 2003, n° 01‑44.172; Cass. soc., 9 avr. 2008, n° 07‑41.340), quand bien même il s’en serait réservé la possibilité (Cass. soc., 13 nov. 1991 : Bull. civ. V, n° 491) ;
Il peut simplement être amené à préciser ou à développer les motifs figurant dans la lettre de licenciement (Cass. soc., 30 sept. 1997).
− le juge appelé à trancher s’en tiendra, pour apprécier le caractère réel et sérieux de la mesure, aux seuls griefs contenus dans la lettre de licenciement (Cass. soc., 23 janv. 2001, n° 98‑44.009 : JurisData n° 2001‑007967).
Il lui appartient donc de vérifier si la lettre de licenciement a bien été motivée (Cass. soc., 26 mai 1999 : Bull. civ. V, n° 235).
La lettre de licenciement faisant état de motifs non abordés lors de l’entretien préalable ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse : simple irrégularité de forme (Cass. soc., 17 déc. 2014, n° 13‑20.217).
1684 Le juge est toutefois appelé à qualifier les faits invoqués. Ainsi, par exemple, si l’employeur invoque une faute grave à l’appui d’un licenciement, le juge pourra la requalifier en faute « seulement » sérieuse (Cass. soc., 22 févr. 2005, n° 03‑41.474).
Pour plus de précisions sur le contentieux de la rupture du contrat de travail, V. n° 8084.
3° Délai d’expédition de la lettre
1685 La lettre de notification du licenciement ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date à laquelle le salarié a été convoqué à l’entretien préalable.
Dans le cas où ce délai expire un samedi, un dimanche, ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Lorsque la lettre de licenciement est envoyée moins d’un jour franc après l’entretien préalable, voire le jour même de l’entretien, le licenciement est irrégulier, et cette irrégularité ne peut être réparée par l’envoi postérieur d’une lettre de licenciement dans le délai prescrit (Cass. soc., 27 nov. 2001, n° 99‑44.889).
C’est la date d’expédition de la lettre et non celle de sa rédaction ou de sa réception qui doit être prise en considération pour apprécier le respect du délai.
1686 En revanche aucun délai maximum n’est en principe fixé entre l’entretien préalable et la notification du licenciement. En conséquence, l’envoi de la lettre plus d’un mois après l’entretien est valable (Cass. soc., 30 oct. 1991, n° 87‑45.256).
Attention Un délai maximum d’un mois s’impose toutefois en cas de licenciement disciplinaire.
L’éventuel report d’entretien résultant de la seule initiative de l’employeur n’emporte pas report de ce délai maximal ; le délai de notification a toujours pour point de départ la date initialement prévue pour l’entretien (Cass. soc., 23 janv. 2013, n° 11‑22.724 : JurisData n° 2013‑000749).
Toutefois, la nécessité de mettre en oeuvre une procédure conventionnelle particulière peut justifier un dépassement de ce délai (V. n° 1688 et s.).
4° Effets de la notification
1687 C’est le jour de l’envoi de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception notifiant le licenciement qui marque la date de la rupture des relations de travail, et non le jour de la réception de la lettre par le destinataire (Cass. soc., 6 mai 2009, n° 08‑40.395 : JurisData n° 2009‑048054).
Au cas de remise en main propre de la lettre, c’est le jour de sa présentation au salarié qui compte ; et peu importe que l’intéressé ait refusé de prendre et de signer le reçu dès lors que l’employeur est à même d’apporter la preuve de sa tentative de remise (Cass. soc., 16 déc. 2009, n° 08‑42.922).
C’est aussi à compter de cette date que s’apprécie l’ancienneté du salarié (Cass. soc., 26 sept. 2006, n° 05‑43.841 : JurisData n° 2006‑035160).
En revanche, le cas échéant, le préavis ne court qu’à compter de la date à laquelle la lettre est présentée au salarié (C. trav., art. L. 1234‑3. – Cass. soc., 7 nov. 2006, n° 05‑42.323 : JurisData n° 2006‑035800. – Sur le préavis, V. n° 2177). À la fin de ce préavis, l’employeur verse au salarié les indemnités éventuellement dues (V. n° 2235) et lui remet les documents de fin de contrat (V. n° 2296).
Remarque Une rupture conventionnelle peut être conclue après la notification d’un licenciement ; elle vaut alors renonciation commune des parties à ce dernier (Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13‑20.549).
III. Incidences d’une procédure conventionnelle
1688 Procédure impérative – Il arrive que la convention collective ou un accord collectif, ou encore le statut du personnel, prévoie, avant le prononcé de tout licenciement, l’intervention d’un conseil de discipline ou d’une commission paritaire (notamment en cas de licenciement disciplinaire).
Cette procédure conventionnelle s’impose à l’employeur, sans pour autant le dispenser d’avoir à respecter la procédure légale d’ordre public (avec, notamment, la formalité de l’entretien préalable : Cass. soc., 31 janv. 2006, n° 03‑43.300).
Le salarié doit être informé de son existence.
1689 Conséquences du non-respect de la procédure – Le défaut d’information du salarié sur les conditions d’intervention de l’instance paritaire comme, plus généralement, le non-respect par l’employeur de ses obligations conventionnelles, conduit à l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement (Cass. soc., 1er févr. 2012, n° 10‑10.012 : JurisData n° 2012‑001244. – Cass. soc., 9 janv. 2013, n° 11‑25.646 : JurisData n° 2013‑000026).
Est ainsi jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié opéré au mépris des dispositions conventionnelles constituant pour lui une « garantie de fond » (Cass. soc., 2 déc. 2015, n° 14‑18.534). Tel est le cas lorsque :
− le salarié n’a pas été avisé de sa comparution devant le conseil de discipline dans les délais prévus par la convention collective (Cass. soc., 18 mai 2011, n° 09‑72.787 : JurisData n° 2011‑008900. – Cass. soc., 22 juin 2011, n° 09‑42.697 : JurisData n° 2011‑012259) ;
− le salarié n’a pas été mis en situation de prendre connaissance de son dossier avant de se rendre à l’instance (Cass. soc., 11 mars 2009, n° 08‑40.453) ;
− le salarié n’a pas été informé de la possibilité qu’il avait lui-même de saisir l’instance paritaire (Cass. soc., 1er févr. 2012, n° 10‑10.012) ;
− l’employeur n’a pas mis en place la commission de discipline en violation de ses engagements (Cass. soc., 16 sept. 2008, n° 06‑46.215) ;
− l’employeur n’a pas, dans la lettre de convocation à l’entretien préalable, énoncé le ou les motifs de licenciement envisagé, alors que la convention collective le lui imposait (Cass. soc., 9 janv. 2013, n° 11‑25.646) ;
− le conseil de discipline a rendu son avis sans attendre le salarié, alors que celui-ci, malade, avait demandé le report de la réunion (Cass. soc., 16 sept. 2008, n° 07‑41.532) ;
− les délégués du personnel n’ont pas été préalablement informés, alors qu’un accord collectif prévoyait cette consultation (Cass. soc., 17 mars 2015, n° 13‑14.252).
En revanche, n’ont pas été jugés de nature à affecter la validité du licenciement :
− le non-respect par l’employeur de la disposition conventionnelle prévoyant la possibilité pour le salarié de saisir une commission paritaire postérieurement à son licenciement, ladite commission n’étant donc pas appelée à se prononcer sur le principe même du licenciement (Cass. soc., 2 juill. 2008, n° 06‑44.895) ;
− l’absence de notification de l’avis rendu par l’organisme consultatif (Cass. soc., 3 juin 2009, n° 07‑42.432) ;
− le fait pour l’employeur de ne pas avoir respecté son obligation conventionnelle de mettre en place une commission composée de représentants du personnel, dès lors qu’il atteste par la production d’un PV de carence aux élections professionnelles, de son impossibilité de réunir un tel conseil (Cass. soc., 10 déc. 2015, n° 14‑16.214).
1690 L’avis simplement « demandé » au conseil de discipline, comme c’est souvent le cas, ne lie pas l’employeur.
Si cet avis est négatif, le licenciement ne sera pas, à ce seul titre, dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 3 déc. 2002, n° 00‑46.055).
De même, le fait que le conseil de discipline ne soit pas parvenu à rendre un avis parce que ses membres n’ont pas su se départager n’empêche pas la procédure de licenciement de suivre valablement son cours (Cass. soc., 3 juin 2009, n° 07‑42.432 : JurisData n° 2009‑048533).
L’absence d’un membre du conseil de discipline n’affecte pas la validité de la procédure (Cass. soc., 16 déc. 2014, n° 13‑23.375).
En revanche, le défaut d’impartialité dans la composition du conseil de discipline prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 17 déc. 2014, n° 13‑10.444).
Remarque Si l’avis du conseil de discipline ne doit pas être nécessairement donné avant l’entretien préalable, il doit cependant être sollicité et connu avant que l’employeur ne prenne sa décision (Cass. soc., 28 sept. 2005, n° 02‑45.926).
IV. En pratique
1691 Présentation synthétique des délais – Les délais à respecter dans le cadre de la procédure légale de licenciement pour motif personnel peuvent être résumés de la façon suivante :
Délai minimal entre la convocation et l’entretien préalable | ||
Présentation de la LRAR ou remise en mains propres de la convocation | Date de l’entretien (1) | |
Lundi | À partir du lundi suivant | |
Mardi | À partir du mardi suivant |
|
Mercredi | À partir du mercredi suivant |
|
Jeudi | À partir du jeudi suivant |
|
Vendredi | À partir du vendredi suivant |
|
Samedi | À partir du lundi suivant | |
(1)Sauf en cas de jour férié entre la présentation ou la remise de la convocation et la date de l’entretien |
Délai minimal de notification |
||
Entretien | Envoi de la notification du licenciement(1) | |
Lundi | À partir du jeudi suivant | |
Mardi | À partir du vendredi suivant |
|
Mercredi | À partir du lundi suivant |
|
Jeudi | À partir du lundi suivant |
|
Vendredi | À partir du mardi suivant |
|
Samedi | À partir du mercredi suivant | |
(1)Sauf en cas de jour férié entre la date de l’entretien et celle de l’envoi de la lettre de notification du licenciement |
1692 Exemples de computation des délais – En application des délais de convocation à l’entretien préalable (V. n° 1663) et de notification du licenciement (V. n° 1685), la procédure est régulière si :
− le salarié dont le licenciement pour insuffisance professionnelle est envisagé a été convoqué par son employeur, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le mardi 1er juillet 2014, à un entretien préalable fixé le mardi 8 juillet 2014, son licenciement lui ayant ensuite été notifié par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le mardi 12 août 2014 ;
− le salarié dont le licenciement pour faute grave est envisagé a été convoqué par son employeur, qui a eu connaissance de la faute commise le mardi 3 juin 2014, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le mardi 1er juillet 2014, à un entretien préalable fixé le mardi 8 juillet 2014 ; son licenciement lui ayant ensuite été notifié par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le vendredi 25 juillet 2014.
En revanche, la procédure est irrégulière lorsque :
− le salarié dont le licenciement pour insuffisance professionnelle est envisagé a été convoqué par son employeur, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le mardi 1er juillet 2014, à un entretien préalable fixé le vendredi 4 juillet 2014 (délai de convocation non respecté) ;
− le salarié dont le licenciement pour insuffisance professionnelle est envisagé a été convoqué par son employeur, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le mardi 1er juillet 2014, à un entretien préalable fixé le mardi 8 juillet 2014, son licenciement lui ayant ensuite été notifié par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le mercredi 9 juillet 2014 (délai minimal de notification non respecté) ;
− le salarié dont le licenciement pour faute grave est envisagé a été convoqué par son employeur, qui a eu connaissance de la faute commise le 3 juin 2014, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le vendredi 8 août 2014, à un entretien préalable fixé le lundi 18 août 2014 (faits fautifs prescrits) ;
− le salarié dont le licenciement pour faute grave est envisagé a été convoqué par son employeur, qui a eu connaissance de la faute commise le 3 juin 2014, par lettre recommandée avec avis de réception présentée le mardi 1er juillet 2014, à un entretien préalable fixé le mardi 8 juillet 2014 ; son licenciement lui ayant ensuite été notifié par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le mardi 12 août 2014 (délai maximal de notification non respecté).
1693 Remboursement du salaire du conseiller du salarié – L’employeur d’un conseiller du salarié qui souhaite obtenir le remboursement par l’Administration des salaires maintenus durant l’exercice de sa mission (V. n° 1670) doit adresser une demande à la DIRECCTE, contresignée par le conseiller du salarié, mentionnant l’ensemble des absences de l’entreprise ayant donné lieu à maintien de la rémunération ainsi que les autres éléments nécessaires au calcul des sommes dues. Ce formulaire de demande de remboursement est accompagné :
− d’une fiche d’identification dûment remplie et accompagnée d’un relevé d’identité bancaire ou postal ;
− des attestations des salariés bénéficiaires de l’assistance ;
− de la copie du bulletin de salaire du conseiller pour le mois concerné ;
− d’une fiche relative aux éléments de rémunération.
Des modèles de fiche d’identification, de formulaire de demande de remboursement du salaire maintenu et de fiche relative aux éléments de rémunération sont disponibles sur les sites internet des DIRECCTE.
Ce remboursement est effectué mensuellement par l’Administration.
En cas d’employeurs multiples, il est produit autant de demandes de remboursement qu’il y a d’employeurs ayant maintenu des salaires.
Pour aller plus loin
• JCl. Travail Traité, Fasc. 30‑30 (Licenciement pour motif personnel. – Cause et procédure) • Fasc. 30‑20 (Conseiller
du salarié)
• Fasc. 1620 (Licenciement personnel. – Formules)
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