[Libres propos] Les failles de la régulation des services en ligne de médiation ou de conciliation

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 19 – 13 MAI 2019

LA SEMAINE DU DROIT LIBRES PROPOS

MÉDIATION

Les failles de la régulation des services en ligne de médiation ou de conciliation

POINTS-CLÉS➜ L’article 4 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice insère dans la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 des articles 4-1 à 4-7 ayant pour objet de déterminer le cadre juridique applicable aux personnes physiques ou morales proposant un service en ligne de médiation ou de conciliation ➜ Pourtant, les conditions légales de leur contrôle, de leur régulation et de leur certification ne permettent pas d’offrir aux justiciables les garanties exigées dans un Etat de droit

Valérie Lasserre, professeur à Le Mans Université

Avec la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018- 2022 et de réforme pour la justice (V. aussi JCP G 2019, doctr. 495, Étude J. Théron ; JCP G 2019, doctr. 524, J.-B. Thierry), les plateformes privées en ligne de médiation ou de conciliation conventionnelle trouvent définitivement leur place dans le système juridique. Elles sont présentées comme la solution idéale pour répondre à l’objectif clairement exprimé et assumé de désengorgement des tribunaux et de déjudiciarisation, ainsi que pour relever le défi de l’extension de l’obligation de tentative de médiation ou de conciliation préalable à la saisine du juge pour les litiges du quotidien également prévue dans cette loi. Elles s’inscrivent dans le sillon des règlements amiables des litiges du droit de la consommation. Depuis l’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015, transposant la directive européenne 2013/11/UE relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation, tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l’oppose à un professionnel et doit avoir la possibilité de déposer en ligne une demande de médiation (C. consom., art. L. 614-1). Avec cette différence essentielle que, contrairement au consommateur, le justiciable qui n’invoque pas le droit de la consommation est tenu de financer lui-même l’accès à la plateforme en ligne de médiation ou de conciliation. Ces plateformes en ligne suivent aussi le sillage de la plateforme européenne de règlement en ligne des litiges de consommation (PE et Cons. UE, règl. (UE) n° 524/2013, 21 mai 2013, relatif au règlement en ligne des litiges de consommation).

Les justiciables moins protégés que les consommateurs. – L’article 4 de la loi de programmation 2018-2022 prévoit, à côté de la protection des données à caractère personnel, et de la confidentialité, sauf accord des parties, que « le service en ligne délivre une information détaillée sur les modalités selon lesquelles la résolution amiable est réalisée » , que « les personnes physiques ou morales qui concourent à la fourniture ou au fonctionnement des services en ligne » de médiation ou de conciliation « accomplissent leur mission avec impartialité, indépendance, compétence et diligence » et que « l’article 226-13 du Code pénal leur est applicable » . Quelle impartialité ? Quelle indépendance ? Quelle compétence ? Quelle diligence ?

LA SEMAINE JURIDIQUE – EDITION GÉNÉRALE

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck