[Libres propos] Une « crise » du concours d’agrégation ?

EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 6 – 10 FÉVRIER 2020

La semaine du droit – Libres propos

Une « crise » du concours d’agrégation ?

Les postes de professeurs et maîtres de conférences en Droit et Science politique

Points-clés ➜ Le faible nombre de postes de professeurs offerts aux concours d’agrégation de droit public et d’histoire du droit a suscité l’émoi de la communauté universitaire Il ne semble pas que le concours d’agrégation soit particulièrement visé : la démographie et le rééquilibrage entre les sections expliquent la baisse du nombre de postes Les facultés de droit et de science politique souffrent en outre d’un taux d’encadrement très inférieur à ce qui existe dans les autres disciplines universitaires

POUR LE GROUPE DE TRAVAIL (V. liste des membres ci-contre)

Julien Boudon, doyen de la faculté de droit et de science politique de Reims

La présente note a pour origine le faible nombre de postes mis au concours d’agrégation dans les sections 02 et 03 au titre de l’année 2019-2020. En effet, 6 postes ont été offerts en droit public et 2 en histoire du droit (4 ont été finalement pourvus le 29 janvier 2020). La circonstance n’est pas inédite pour l’histoire du droit puisque le précédent concours, pour l’année 2017-2018, avait ouvert avec 3 postes. En revanche, c’est une nouveauté pour le droit public : le précédent concours, pour la même année universitaire, avait pu compter d’emblée sur 15 postes, portés in fine à 23. L’émoi a été vif dans la section 02, au point que la présidente du jury, Mme Lombard, a rédigé un communiqué (Lettre ouverte, 27 sept. 2019 , largement diffusée et disponible sur le compte Facebook de Mme Lombard ; V. aussi l’interview publiée par Dalloz Actualité, 30 sept. 2019) et qu’une une pétition a été mise en ligne le 21 octobre « pour défendre et réformer le concours d’agrégation
», à l’initiative de sept professeurs de Paris I, Paris II et Strasbourg (https://www.petitions.fr/defendre_lagregation_de_droit_et_la_reformer . – La pétition a obtenu un peu moins de 800 signatures).

Plusieurs explications sont avancées pour expliquer cette chute du nombre de postes mis au concours d’agrégation de droit public (V. en ce sens les réactions à l’interview précitée de Mme Lombard sur le site internet Dalloz Actualité ). Tantôt le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation est pointé du doigt en tant qu’il n’accorderait pas de postes. Tantôt les présidents d’université et leur Conférence (CPU) sont accusés : par hostilité au concours d’agrégation, qui ne permet pas aux établissements de choisir le profil des professeurs agrégés, les universités gèleraient des postes et miseraient uniquement sur les dispositions de l’article 46 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984. Tantôt enfin les doyens des Facultés de droit et de science politique voient leur responsabilité engagée : soit par rejet du concours d’agrégation, soit par désintérêt pour le recrutement de professeurs, soit pour des raisons institutionnelles (liées à des relations difficiles avec la présidence de l’université), ils ne joueraient pas le jeu de l’agrégation.

La Conférence des doyens des facultés de droit et de science politique a désiré établir un bilan impartial, basé sur des statistiques incontestables qui ont été présentées à sa session de Nancy le 8 novembre 2019. Elle a adopté à cette occasion la motion suivante :
« La Conférence des doyens des facultés de droit et de science politique a toujours apporté son soutien au concours d’agrégation en tant que voie d’accès nationale au corps des professeurs d’université. Au moment où le nombre de postes mis au concours chute dans les quatre sections du Groupe 01, elle réaffirme son soutien à ce mode de recrutement et à la diversité des voies d’accès au corps des professeurs. La Conférence rappelle le rôle qu’elle a joué année après année pour accroître significativement le nombre de postes finalement proposés par les Universités. Elle tient à souligner que les mérites de l’agrégation ne sauraient être évalués de façon isolée et que c’est l’ensemble des postes de professeurs et de maîtres de conférences qui doit être examiné dans un contexte d’extrême sous-encadrement de nos disciplines…

LA SEMAINE JURIDIQUE ÉDITION GÉNÉRALE

Le magazine scientifique du droit.

Votre revue sur tablette et smartphone inclus dans votre abonnement.

AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck