EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE DU DROIT – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 48 – 23 NOVEMBRE 2020
Fabrice Fages, avocat associé, Latham & Watkins, membre de la commission « Pour un droit européen de la compliance » du Club des juristes Elise Auvray, avocat, Latham & Watkins

Trois ans après la publication de ses premières recommandations destinées à guider les personnes morales dans la mise en place d’un dispositif de prévention et de détection de la corruption, l’Agence française anticorruption (AFA) publie un nouveau projet, ayant fait l’objet d’une consultation publique qui vient de s’achever. Cette actualisation est marquée par la volonté de tirer les enseignements de ses premières années d’activité. Elle s’inscrit également dans la continuité de la vaste enquête (V. AFA, Diagnos- tic national sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises,
21 sept. 2020) menée par l’AFA aux résultats selon elle sans appel : la maturité des dispositifs anticorruption en entreprise n’est pas au niveau attendu. Forte de ses constats sur le terrain, l’AFA fait le choix de nouvelles recommandations particulièrement détaillées pour ne pas dire prescriptives, et ce à maints égards. Un tel degré de précision n’est pas sans inconvénient pour les entreprises, lesquelles, ainsi que le souligne un récent rapport du Club des juristes, peuvent craindre l’ambiguïté de la portée de telles recommandations : bien que déniées de toute valeur contraignante, la commission des sanctions a considéré que leur non-respect imposait à l’entreprise de démontrer sa conformité aux prescriptions de la loi Sapin 2 (AFA, comm. sanctions, 4 juill. 2019, n° 19-01 : JCP G 2019, 1054, note Y. Paclot) renversant ainsi la charge de la preuve pour celles qui s’en écarteraient. Aussi, à la lecture de ce nouveau projet, les efforts demandés aux entreprises peuvent paraître considérables. Mais le pire serait que de tels efforts s’avèrent vains, soit parce que le dispositif mis en place n’aide pas efficacement l’entreprise à se prémunir du risque de corruption soit parce qu’il ne convainc pas l’autorité de contrôle. D’après notre expérience, le principal point de vigilance réside dans la capacité de démontrer, que ce soit dans le cadre de contrôles ou devant la commission des sanctions, que son dispositif est réellement déployé et adapté aux risques. Comment les entreprises peuvent-elles alors espérer convaincre l’AFA de l’effectivité de leur dispositif anti-corruption ? Selon nous, plusieurs actions essentielles (communiquer, contrôler, formaliser…) doivent imprégner la démarche de « mise en œuvre » du dispositif anticorruption, au premier rang desquelles, et de manière a priori paradoxale, l’identification et la remédiation des failles.
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