EXTRAIT DE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 45 – 8 NOVEMBRE 2021
Grégoire Bertrou, avocat associé Willkie Farr & Gallagher LLP, partenaire du Club des juristes

Alors que l’article 3 de la première mouture du projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire prévoyait simplement d’ajouter
à l’article préliminaire du Code de procédure pénale un alinéa limitant son respect au « secret professionnel de la défense », la dernière version adoptée en commission mixte paritaire le 21 octobre, tout en rappelant
que le secret professionnel est également opposable en matière de conseil, est venu en restreindre maladroitement la portée. Il prévoit en effet d’introduire un nouvel article 56-1-2 au Code de procédure pénale offrant la possibilité de lever le secret dans l’hypothèse où (i) les échanges avocat-client permettraient d’établir la preuve « de leur utilisation aux fins de commettre ou de faciliter la commission » de certaines infractions (fraude fiscale, financement d’une entreprise terroriste, corruption, trafic d’influence et leur blanchiment) et (ii) « l’avocat a fait l’objet de manœuvres ou actions aux fins de permettre, de façon non intentionnelle, la commission, la poursuite ou la dissimulation d’une infraction ». Nonobstant le caractère fort peu intelligible de cette dernière exception « d’instrumentalisation » de l’avocat par son client, dont on peut espérer qu’elle sera précisée par le Gouvernement, faut-il pour autant voir dans ce texte une menace pour l’État de droit ? On peut en douter. Tout d’abord, parce que son champ d’application ne concerne que la « procédure pénale
». Ensuite, et surtout, parce qu’il a le mérite de rappeler que l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 protège le secret professionnel « de la défense et du conseil » et, ainsi défini, de le rendre opposable à tous les stades de la procédure. Ce faisant, le nouvel article préliminaire pourrait bien obliger la chambre criminelle de la Cour de cassation à abandonner sa conception restrictive, pour ne pas dire contra legem, de l’article 66-5 selon laquelle ne bénéficieraient de cette protection que les échanges avocat-client liés à l’exercice des droits de la défense (Cass. crim., 20 janv. 2021, n° 19- 84.292).
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