EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 21-22 – 27 MAI 2019
LA SEMAINE DU DROIT LES ACTEURS
La défense, à coeur
Projeté jusqu’au 4 juin, le documentaire « À coeur d’avocats » de la cinéaste française Mika Gianotti pénètre l’univers d’avocats de la défense et saisit leurs pensées intimes.

«Défendre un homme, c’est le ramener dans la communauté des hommes ». Ainsi parle Henri Leclerc au début du film. Et de la défense pénale, tout est dit ou presque. Dans ce documentaire de 53 minutes, Mika Gianotti, qui filme depuis 20 ans des hommes et des femmes de loi, est allée voir « sous la robe », pour sonder l’âme de ces hommes et femmes engagés dans la défense pénale. Et tenter de percer le mystère de cette conviction intime qui leur colle à la peau. « Ce devoir de défendre un autre être humain est viscéral. On ne sait pas vraiment d’où il vient. Il est difficile pour eux de le théoriser » explique-t-elle.
Sous les ors de l’ancien Palais de Justice, à l’Ordre, ou autour d’un diner, Mika Gianotti a capté des instants volés. Avec pudeur, ces « personnages » dévoilent un peu d’eux-mêmes, de leurs émotions, de leur quotidien aux prises avec le côté sombre de leurs contemporains. L’ancien, Henri Leclerc, y côtoie la jeune génération, Karim Laouafi , Merabi Murgulia, Rachel Lindon, Thomas Heintz, Soraya Nouar.
Le film s’ouvre sur l’appel d’une mère affolée : son fils s’est battu, il est au commissariat, l’autre jeune est dans le coma entre la vie et la mort. Me Karim Laouafi , téléphone vissé à l’oreille, quitte son cabinet : « Ne paniquez pas Madame, j’arrive ». Un peu plus loin, Me Laouafi raconte son premier dossier « terro » en commission d’office. Son client lui avait demandé : « Ne plaidez pas maître, c’est couru d’avance ». Autre moment : sur un banc devant l’ancien tribunal sur l’Île de la Cité, Henri Leclerc converse avec Merabi Murgulia. À 52 années d’intervalle, ils ont tous deux été 3 e secrétaire de la Conférence. Le premier raconte sa première commission d’office auprès d’un homme yougoslave accusé de vol pour avoir bu du lait dans des bouteilles livrées devant les habitations parce qu’il était sans ressources. Il avait pris 6 mois ferme. Le second conte son histoire. Arrivé de Russie en 1999 avec sa troupe de danseurs géorgiens, 2 valises et un billet de 100 francs, une amie avait plaidé sa cause pour qu’il soit scolarisé alors qu’il ne parlait pas français. « Pour moi, la plus belle des plaidoiries. Ce métier me transcende, je me dis que je pourrais être à la place de mes clients. On n’a pas tous les mêmes chances au départ ».

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck