EXTRAIT DE LA REVUE LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 24 – 17 JUIN 2019
LA SEMAINE DE LA DOCTRINE LA VIE DES IDÉES
LE MOT DE LA SEMAINE
Preuve
La jurisprudence florissante de l’administration de la preuve par l’employeur en matière de licenciement
Jérôme Halphen, avocat associé, Département Employment, DLA Piper France, partenaire du Club des juristes et Charlotte Biedrzycki, avocat, Département Employment, DLA Piper France, partenaire du Club des juristes

La preuve par des moyens de surveillance. – La surveillance des salariés et le contrôle de leur activité est un droit de l’employeur inhérent à son pouvoir de direction. Elle peut revêtir des formes variées (vidéosurveillance, enregistrements, système de géolocalisation…) et peut avoir des objectifs divers (contrôle des présences, de la productivité…).
Cependant, si elle est autorisée, c’est notamment à condition que le salarié en ait été préalablement informé et les instances représentatives du personnel consultées. En outre, tant qu’il implique un traitement de données, il doit être conforme à la loi informatique et liberté (et depuis peu au RGPD). Dans le cas contraire, les informations collectées ne constituent pas des preuves recevables et ne peuvent constituer un fondement pour sanctionner un salarié.
Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a une nouvelle fois validé la sanction de l’usage abusif par un salarié du réseau internet à des fins personnelles ( Cass. soc., 3 oct. 2018, 17-13.089 : Juris- Data n° 2018-016914 ). En l’espèce, un salarié s’était connecté 800 fois en un mois dont 200 fois en sept jours à des sites à caractère pornographique depuis un ordinateur mis à sa disposition par son employeur et strictement affecté à un usage professionnel. Si un tel comportement est sanctionnable, encore faut-il prouver que le salarié en question est bien l’auteur des connexions litigieuses.
L’employeur entendait démontrer la présence du salarié dans l’entreprise lors des connexions à l’aide d’un système de géolocalisation mis en place sur le véhicule attribué au salarié. Or, ce système n’avait pas fait l’objet d’une déclaration auprès de la CNIL, n’avait pas été soumis à une consultation des représentants du personnel et n’avait pas fait l’objet d’une information individuelle préalable auprès des salariés. Par conséquent, la Cour a jugé que cela ne constituait pas un mode de preuve licite. Quelques jours auparavant, la Cour de cassation a rappelé que les images de vidéosurveillance constituaient une preuve illicite en raison de l’absence d’information de la salariée de l’existence du système de surveillance (Cass. soc., 20 sept. 2018, n° 16-26.482 : JurisData n° 2018-016012).
Mais elle est allée plus loin en déclarant qu’un aveu extra-judiciaire obtenu par la gendarmerie, consécutif à l’exploitation illicite d’images de vidéosurveillance, ne peut être considéré comme une preuve recevable dans le cadre d’une procédure de licenciement…

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck