Règlement (UE) relatif aux procédures d’insolvabilité

Extrait de la Revue : La Semaine Juridique Edition Générale n°27

LA SEMAINE DU PRATICIEN INFORMATIONS PROFESSIONNELLES

« Le Règlement ‘insolvabilité’ est applicable aux procédures ouvertes avant que le débiteur ne soit insolvable »

3 questions à Aude Dupuis, Senior Attorney et Fabrice Baumgartner, Partner, Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP

Depuis le 26 juin, le règlement (UE) n° 2015/848 du 25 mai 2015 est applicable aux procédures d’insolvabilité transnationales ouvertes postérieurement à cette date. Avec un champ d’application élargi au-delà des procédures d’insolvabilité au sens strict, le texte apporte une meilleure articulation entre procédures principales et secondaires, facilite l’information des créanciers étrangers, et organise un régime de traitement des difficultés des groupes. Éléments d’analyse avec Aude Dupuis et Fabrice Baumgartner.

Le règlement (UE) n° 2015/848 du 25 mai 2015 relatif aux procédures d’insolvabilités transnationales est désormais applicable à celles ouvertes à compter du 26 juin 2017. Quelles sont de votre point de vue les innovations essentielles qu’il consacre ?

L’une des principales innovations du règlement (UE) n° 2015/848 du 25 mai 2015 (le « Règlement ») est d’élargir son champ d’application au-delà des procédures d’insolvabilité au sens strict, qui étaient seules concernées par le règlement (CE) n° 1346/2000 précédemment applicable. En effet, contrairement à ce que son intitulé pourrait laisser penser, le Règlement est applicable aux procédures ouvertes avant que le débiteur ne soit insolvable, dès lors qu’elles sont publiques, fondées sur des législations relatives à l’insolvabilité, et qu’elles impliquent (i) un dessaisissement total ou partiel du débiteur, ou (ii) un contrôle ou une surveillance d’une juridiction sur les actifs et les affaires du débiteur, ou (iii) une suspension provisoire des poursuites individuelles. En France, la procédure de sauvegarde et ses variantes (sauvegarde accélérée et sauvegarde financière accélérée) répondent à cette définition et sont d’ailleurs visées à l’Annexe A du Règlement comme constituant des « procédures d’insolvabilité » au sens du Règlement. Il s’agit là d’un apport majeur du Règlement. Compte tenu de l’importance croissante des procédures collectives préventives en France et ailleurs, destinées à anticiper au maximum les difficultés du débiteur afin d’augmenter les chances de succès d’une restructuration, il était essentiel qu’elles puissent bénéficier d’une reconnaissance au sein de l’Union européenne et des outils prévus par le Règlement. Les autres innovations importantes du Règlement s’articulent autour de trois grands axes. Le premier est l’amélioration de l’articulation entre procédures principales et procédures secondaires. La procédure secondaire ouverte dans un État membre où le débiteur possède un établissement n’est plus nécessairement une procédure liquidative, mais peut prendre la forme de toute « procédure d’insolvabilité » entrant dans le champ d’application du Règlement, ce qui offre une flexibilité bienvenue dans les cas où l’établissement concerné est viable. Par ailleurs, le Règlement prévoit un dispositif permettant au praticien de l’insolvabilité de la procédure principale d’éviter l’ouverture intempestive de procédures secondaires, s’il prend l’engagement que les créanciers locaux bénéficieront du même traitement que si une procédure secondaire avait été ouverte. Enfin, le Règlement organise de manière à la fois souple et détaillée la coopération et la communication entre les praticiens de la procédure principale et des procédures secondaires, entre les juridictions ayant ouvert les différentes procédures, et entre les praticiens et les juridictions. Il valide notamment la création de la pratique consistant à conclure des accords de coopération entre praticiens, qui se sont avérés très utiles dans le cadre de dossiers transfrontaliers complexes. Une autre innovation significative du Règlement est l’amélioration de la situation des créanciers situés hors de l’Etat d’ouverture de la procédure. Il est notamment prévu de mettre en ligne un formulaire uniformisé permettant aux praticiens de l’insolvabilité d’informer les créanciers étrangers connus de l’ouverture de la procédure et un formulaire uniformisé permettant aux créanciers étrangers de déclarer leur créance. Le Règlement vise aussi à améliorer l’information des créanciers étrangers en imposant aux États membres la création de registres d’insolvabilité et en prévoyant la mise en place par la Commission d’une interconnexion de ces registres permettant au public d’y accéder en ligne à partir du portail européen e-Justice. Enfin, la dernière grande innovation du Règlement est la création d’un régime de traitement des difficultés des groupes.

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La Semaine Juridique – Édition Générale N°27, 3 Juillet 2017 

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AUTEUR(S) : N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck

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