Retour sur la rencontre ASEAN/UE à Phnom Penh

Extrait de la Semaine Juridique Edition Générale

LA SEMAINE DE LA DOCTRINE LA VIE DES IDÉES

L’ACTION DU MOIS

Retour sur la rencontre ASEAN/UE à Phnom Penh

Michel Grimaldi, professeur à l’université Panthéon-Assas (Paris II), président du Conseil scientifique de la Fondation pour le Droit Continental

La Fondation pour le droit continental et l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française ont organisé au Cambodge, à Phnom Penh, une rencontre entre l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN comprenant : Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam) et l’Union européenne (UE), les 30 et 31 octobre.
Ces journées, qui ont reçu le précieux soutien des ambassades de l’UE et de la France au Cambodge, avaient pour objet de nourrir la réflexion, d’abord sur une comparaison entre les deux ensembles régionaux, qui l’un comme l’autre présentent une forte hétérogénéité politique, économique, linguistique et culturelle, et ensuite sur le développement des relations entre ces deux ensembles. Elles ont réuni des diplomates, des universitaires, des avocats et des notaires, présents en Asie ou venus d’Europe. Elles furent inaugurées par M. Prak Sokhonn, ministre des Affaires étrangères du Cambodge. JCPG-ActionMois-ASEANLes travaux, qui seront publiés, se déroulèrent en quatre tables rondes. La première, présidée par M. Sok Siphana, conseiller du Gouvernement royal du Cambodge, fut consacrée à La dimension politique de l’ASEAN. On y évoqua les circonstances de la création et du développement de l’ASEAN, ainsi que les objectifs de l’ASEAN, à savoir créer un espace politique, assurant la paix entre les États, un espace économique, permettant la circulation des personnes et des capitaux, un espace social, propice à la protection des travailleurs, un espace environnemental, un espace culturel et enfin un espace de coopération judiciaire. On y parla également de l’insertion de l’ASEAN dans le concert mondial. La deuxième table ronde, présidée par Mme Marie Goré, professeur à l’université Panthéon-Assas (Paris II), fut dédiée à La dimension juridique de l’ASEAN. Il s’agissait d’examiner ici, non seulement les traités fondateurs de l’ASEAN, mais aussi, le cas échéant, le droit dérivé de ces traités. Au cours des travaux, l’accent fut mis sur la logique intergouvernementale de l’ASEAN et sur l’absence de supranationalité, clairement voulue par les États fondateurs, même si, avec la Charte de 2007, certains concepts tels que « piliers » ou » communautés » ont été directement inspirés par la structure européenne. Tant au plan du pouvoir d’impulsion législative que de la part respective du juge et de la loi dans l’élaboration de la norme, l’ASEAN entend ainsi proposer un modèle original. Le seul organe habilité à interpréter la charte est le Sommet, et la création d’une cour commune n’est pas à l’ordre du jour. Sur le plan des normes élaborées par l’ASEAN, la discussion s’est engagée sur les mérites du droit souple ainsi que sur l’opportunité de promouvoir des règles ayant un effet direct. La troisième table ronde, présidée par Mme Laurence Idot, professeur à l’université Panthéon-Assas (Paris II), eut pour thème La dimension économique de l’ASEAN. Elle se déroula en deux temps. Il fut d’abord question de La libération des échanges . Les débats permirent de constater que si, au regard de l’UE, les objectifs de libre circulation des marchandises, des personnes, des services et du capital, qui sont à la base du marché intérieur, avaient été également affi rmés dans l’ASEAN, quoique plus tardivement, les moyens mis en place pour les atteindre étaient profondément différents. Le processus d’intégration que connaît l’UE ne se retrouve pas dans l’ASEAN, où le processus suivi obéit aux règles du droit international classique, puisque ce sont des accords internationaux qui permettent de mettre en oeuvre les différentes libertés. Cette différence dans les moyens utilisés fut également constatée lorsque, dans un second temps, on traita de L’organisation des échanges , du respect des règles de concurrence, de la garantie des propriétés intellectuelles et du règlement des différends. Certes, une convergence existe sur la nécessité d’avoir un cadre juridique qui favorise le développement économique avec des règles comparables en matière de droit des sociétés, de fiscalité, mais également de droit de la concurrence et de droit de la propriété intellectuelle. Mais il n’existe pas au sein de l’Asean de règles « supra-nationales ».
La quatrième table ronde enfi n, présidée par le professeur Michel Trochu, professeur émérite de l’université de Tours, eût pour thème L’accord de libre échange conclu entre le Vietnam et l’UE en décembre 2015. Cet accord a permis d’illustrer certaines des questions évoquées dans les précédentes tables rondes. Cette manifestation s’inscrivait dans le cadre plus général de l’action que la Fondation pour le droit continental conduit au Vietnam et au Cambodge : soutien au master de droit des affaires internationales organisé à Ho Chi Minh Ville et Phnom Penh, donnant lieu à la délivrance d’un diplôme français, vietnamien et cambodgien ; soutien au commentaire en cours du nouveau Code civil vietnamien adopté en 2015.

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LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION GÉNÉRALE – N° 50 – 11 DÉCEMBRE 2017 – © LEXISNEXIS SA

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AUTEUR(S) : 

N. Molfessis, D. Bureau, L. Cadiet, Ch. Caron, J.-F. Cesaro, M. Collet, E. Dezeuze, J. Klein, B. Mathieu, H. Matsopoulou, F. Picod, B. Plessix, P. Spinosi, Ph. Stoffel Munck, F. Sudre, B. Teyssié, S. Torck

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